MORTAL ENGINES : MORTELLEMENT ENNUYEUX

LE CAPITAINE CINEMAXX A VU – MORTAL ENGINES

Quand l’équipe du Seigneur des Anneaux et du Hobbit adapte l’œuvre littéraire de Phillip Reeve, Mortal Engines, ça donne ça : une œuvre dénaturée de tout propos, aux effets spéciaux certes, impressionnants, mais limités et aux ambitions scénaristiques très pauvres.
Projet datant de 2009, mis en chantier par l’auteur ayant donné vie aux personnages de Tolkien sur grand écran, Mortal Engines a finalement vu le jour, 9 ans plus tard, avec à son bord, un illustre inconnu. En effet, à la réalisation, on retrouve Christian Rivers – superviseur VFX, technicien et consultant sur les productions de Peter Jackson -, qui fait donc ici ses premiers pas derrière la caméra.
Et alors qu’il avait là l’occasion unique d’entrer dans l’histoire, le jeune poussin s’est littéralement fait étouffer/bouffer par sa propre équipe créative, avec laquelle il travaille depuis des années, et un studio aux exigences miséreuses.

Premier diagnostic, Mortal Engines souffre de son propre concept. Malgré une séquence introductive absolument délicieuse d’un point de vue technique et des plans effroyables sur la cité prédatrice de Londres, où l’on ressent toute la puissance de ce que pourrait être les autres capitales croqueuses de petites villes, le long-métrage produit par Peter Jackson n’offre rien d’autres de palpitant pendant l’heure quarante cinq restante. Le long-métrage suit un schéma scénaristique linéaire, où tous les rebondissements sont attendus, une production sans surprise apparente, là où l’univers de Mortal Engines, vaste et infini, fournissait pourtant une multitude de choix audacieux. Il n’y avait qu’à piocher ! Finalement, c’est une œuvre lisse, creuse, un spectacle fade auquel nous assistons, où Londres semble être la seule cité vivante d’Europe. Car le souci principal réside bien là, où sont les autres métropoles prédatrices dont parlait la voix-off au début du film, où sont les menaces promises ? Apparemment, nul part. La capitale londonienne traverse alors toute l’Europe avec une facilité désarmante, au point que cela en devient risible. Manque de moyens ? Nous y reviendrions dans un instant.
Toutefois, au-delà de cette ambiance soi-disant post-apocalyptique (évincée à coup de flemmardise, ne nous mentons pas), Mortal Engines se fait surtout dévorer par une atmosphère teen-movie et une romance bas de gamme entre les deux héros, Tom et Hester Shaw. Bas de gamme, car cette idylle est écrite avec les pieds, aussi lamentable dans la scénarisation qu’un épisode d’Arrow et en même temps, les relations amoureuses n’ont jamais été le point fort de Peter Jackson et celle de son équipe. Que ce soit Aragon et Arwen ou dans le Hobbit avec Kili et Tauriel – une décision purement marketing avouera plus tard le réalisateur, sans pour autant s’en excuser -, ces amourettes sont le reflet d’une société où l’on tombe amoureux d’un physique ou dans un temps record (deux jours pour Tom et Hester). Bref, peu de subtilité, ni dans l’évolution des sentiments, ni dans les dialogues, clichés au possible.
Quant aux autres personnages secondaires, leurs apparitions sont d’une inutilité flagrante. Aucun retournement de situation ou de motivations cachées, tout est plat et prévisible, sans profondeur. Les scénaristes ne prennent même plus la peine de s’enquiquiner de détails, chacun personnage est à sa place, reste dans sa zone de confort et bouge aveuglement comme des marionnettes sans vie (qui reflète d’ailleurs parfaitement le jeu des acteurs), guidées par un metteur en scène suivant un script dont il est certainement prisonnier. 

Concernant Thaddeus Valentine, on touche les bas-fonds de la psychologie des vilains. Sa seule ambition : prendre le pouvoir sur Londres et dominer le monde. Oui, encore un méchant aux motivations expansionnistes, incapable de donner un semblant de finesse à son discours.
Pourtant, ce dernier avait un background plutôt intéressant. Archéologue, venant du monde d’en bas et voulant accorder aux Londoniens une chance de vivre et non de survivre, Thaddeus avait-là toutes les qualités pour être un bon antagoniste. Malheureusement, une fois ne sera pas coutume, les scénaristes n’ont pas su construire intelligemment une véritable complexité à sa psychologie et, même la relation avec sa fille, contraste de cette fainéantise d’écriture : elle est gentille, il est vilain. Point. Et c’est donc ce manque de contraste que je reproche au film. Aucun protagoniste, comme je l’expliquais plus haut, ne s’élève pour affecter/impacter l’intrigue de manière surprenante.
Enfin, un petit mot sur Shrike, le robot. Seul point digne d’intérêt dans ce film, même si cette sous-intrigue paraissait venir se greffer dans l’intrigue principale comme un cheveu sous la soupe. Cependant, force est de constater qu’il y avait des séquences troublantes, bercées par un mélange de mélancolie et de fatalité face à la vie, très émouvantes, qu’on en vient à regretter la façon dont les scénaristes ont bâclé la fin de cette histoire, qui mériterait presque son propre film.

Finalement, faiblesse d’écriture mise à part, le nerf du problème c‘est le budget de cette (super-)production : 100 millions de dollars. Car quel été le véritable but de ce projet ? Nous embarquer dans un monde au concept novateur, orchestré par des grosses machines bruyantes écrasant tout sur leur passage, le tout avec des effets spéciaux délirants ? Oui, sans aucun doute. Cependant, avec si peu d’argent, comment voulez-vous mettre en scène plusieurs cités géantes en train de s’entretuer ? Comment voulez-vous créer un univers tout entier, où les menaces seraient omniprésentes ? Impossible. Mais l’erreur de départ, c’est aussi d’avoir pensé le film comme un teen-movie et non comme un film grand public, à l’instar d’un Seigneur des Anneaux. Ainsi, le studio, et ce n’est ici que mon avis personnel, n’a injecté qu’une petite somme pour limiter la casse en cas d’échec, mais aussi parce qu’il ne devait pas beaucoup croire en ce projet un peu dingue. Injecter 250 millions de dollars, en sachant qu’un teen-movie ne dépasse jamais les 500 000 millions de dollars (Hunger Games, Le Labyrinthe, Divergente) aurait été pure folie. Avec 100 millions, on limite donc les frais et on prétendra même que c’est un succès, si le film arrive à atteindre les 400-500 millions de dollars au box-office. On se retrouve alors, nous, pauvres spectateurs, à visionner une œuvre fadasse, sans intérêt et dépourvu de scènes d’actions grandiloquentes. Néanmoins, comme la séquence d’introduction est sublime et que la fin du film, quoique bâclée et franchement passable, apporte un dénouement rythmé par de grosses explosions, les gens seront ravis et affirmeront sans peine avoir assisté à la naissance d’une production culte, à l’avenir prometteur.

En conclusion, Mortal Engines déçoit et ne tient jamais ses promesses d’une aventure unique, épique. Une mascarade de plus, signée Peter Jackson, après Le Hobbit, qu’il n’aurait jamais dû accepter de réaliser pour, peut-être, produire un Mortal Engines digne de ce nom.
Intrigue, héros, méchant, situations, tout semble faux ou déjà-vu, tandis que le concept de cités prédatrices est submergé par des histoires d’amoureux ridicules ou des sous-intrigues ennuyeuses. Bref, un ratage total, où même les scènes d’action au corps-à-corps sont brouillonnes et mal cadrées. C’est dire !

 

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