AQUAMAN : ON NE BADINE PAS AVEC LES POISSONS

LE CAPITAINE CINEMAXX A VU – AQUAMAN * SPOILERS *

Avant de commencer, je tenais à préciser que, contrairement à mes collègues journalistes, je ne ferais aucun jeu de mots pourris sur l’eau ou les thèmes liés à la mer, aux poissons, aux baleines et autres petits monstres aquatiques du type : « Aquaman, la critique mouillée » ou « Aquaman, un film pour les femmes fontaines ? ». Entre nous, c’est facile, pas marrant et d’une trivialité assez malvenue, surtout en ces temps troubles, où le féminisme condamne à tous vas les hommes osant évoquer les (poissons-)chattes. Cela dit, les muscles inondés de Jason Momoa ont dû en faire tremper plus d’une, et ça serait malhonnête d’écrire le contraire. Et, si je me suis permis dans le titre de mon article une petite référence à Alfred de Musset, ce n’est certainement pas pour vous faire marrer car mes amis, l’heure est grave, l’océan est en danger…

Alors qu’une guerre est sur le point d’éclater entre la surface et l’Atlantide, Arthur Curry, bâtard au sang-mêlé (naît d’une mère Atlante et d’un père humain, ohlala quel drame !), va devoir affronter son demi-frère, Orm, dont la soif de conquête (non, y’a pas de jeu de mots dans cette phrase !) est incontrôlable, afin de sauver les deux mondes et, dans le même temps, embraser son destin royal.
C’est le point de départ de ce nouveau film DC Comics, consacré au Roi des Mers, Aquaman, super-héros membre de la Justice League, mais le moins populaire de cette bande de joyeux lurons, il était par conséquent essentiel que ce dernier ait le droit à son propre long-métrage. En tout cas, c’est ce que pense la Warner et, pour l’instant, les chiffres au box-office leur donne raison.
Alors, que vaut cette super-production de 200 millions de dollars, mettant en scène un héros qui peine à faire vendre, même si la saga New 52 de Geoff Johns, dont le film est inspiré, à été un grand succès en libraire ? Réponse !

Un univers Star-Warsien ?

Ces dernières années, Hollywood peine à trouver une franchise déclinable à l’infini à la hauteur de Star-Wars où pléthores de villes/environnements, de vaisseaux, de créatures, de costumes, d’armes et de personnages sont crées certes, dans un but purement marketing et commercial, mais également dans le souci de proposer aux spectateurs un spectacle toujours plus innovant avec le souci du détail. Si la qualité scénaristique de ces films laisse souvent à désirer, on ne leur reprochera pas d’imaginer sans cesse de nouvelles choses, car avec la saga de George Lucas, la seule limite est l’imagination des réalisateurs et scénaristes. Avec Aquaman, on retrouve cette folie créative. Le film de James Wan est, en effet, d’une énorme générosité, comme l’ont souligné déjà plusieurs d’entre vous. Vaisseaux aquatiques, mises en scène de bêtes marines, diversités des protagonistes, cités aquatiques, costumes, armes à feu, tout a été pensé, extrêmement travaillé et on sent alors un potentiel immense, jamais vu depuis Star Wars ou Avatar. Or, la richesse de la production DC Comics est aussi son point faible. À trop vouloir montrer à quel point Aquaman à des ressources quasi-illimitées, le film se surcharge en séquences visuelles toute plus folles les unes que les autres, au détriment, toutefois, de la cohérence scénaristique et de facilités absurdes, qui viennent alors gâcher l’ensemble. Effectivement, même si le long-métrage n’a pas vocation à être un Indiana Jones ou un Benjamin Gates, la quête du trident magique est assez désastreuse en terme de narration et, si on omet la séquence d’action en Italie, l’objet magique est retrouvé en près d’un quart d’heure. Les scènes chez les Déserteurs et en Italie manquent de petites scènes avec énigmes un poil plus poussé, afin de donner un peu de corps et d’intelligence au personnage d’Aquaman (même s’il parvient à utiliser la bouteille localisatrice, ne nous leurrons pas, il s’agit ici d’atténuer la stupidité de la séquence précédente « J’aurais pu pisser dessus », comme si les scénaristes n’assumaient pas entièrement le caractère brut de leur héros) et au film lui-même.

Cependant, pour revenir sur le visuel d’Aquaman, le film côtoie le sublime et les plans affreux en CGI. Cependant, pour ma part, je serais plutôt magnanime, car l’ambition et les moyens pour faire vivre des protagonistes/animaux numérisés sous l’eau (car c’est surtout ici que ça coince) demandent des prouesses techniques considérables. Arriver à ce résultat est déjà un exploit.
Parmi les autres scènes/plans les plus marquants, on retiendra :
La séquence d’Atlanna combattant des soldats Atlantes au phare. Ces mouvements de caméra saccadés, comme ceux des personnages, offrent une scène d’action ultra-dynamique et visuellement impressionnante.
La découverte aquatique du monde-sous marin, dont les couleurs ne sont pas sans rappeler ceux d’Avatar avec ces teintes bleutées, violacées absolument divines. La présentation de Wan est également très immersive.
La séquence en Italie, où James Wann démontre tout son talent de réalisateur en utilisant sa caméra de façon astucieuse. Au lieu de découper ses séquences entre Arthur et Mera et avoir un rendu de plans cutés, la caméra se déplace dans l’environnement (d’un point A à un point B) pour suivre les deux héros, chacun livrant une bataille de leur côté. Une merveille !


Le plongeon d’Aquaman et Mera, suite à l’attaque des créatures de la fosses, Les Trench, avec cette photographie apocalyptique et cette petite lumière rouge au loin pour révéler la profondeur abyssale à laquelle ils vont descendre. D’ailleurs, on notera que toute cette partie sur le bateau, rappelle les meilleurs moments horrifiques, dont seul James Wan à le secret.

 

Le plan d’Orm de profil, lorsque qu’arrive l’ultime affrontement avec Arthur. Il y a ce cadrage penché avec une légère contre-plongée, imposante, qui vient appuyer toute la détermination du demi-frère d’Aquaman pour l’emporter.
Ou encore le plan fixe final d’Aquaman. Kitch à souhait, en mode CGI, je le concède, mais cette dernière image m’a marqué par son iconisation assez réussie.

Les goûts et les couleurs…

S.O.S, planète en détresse

À l’heure où les climatosceptiques prennent le pouvoir (coucou Donald Trump, coucou Jair Bolsonaro…), Aquaman délivre un message important : protégeons nos océans et les animaux qui y vivent ! Bien sûr, ce n’est pas le premier blockbusters à ouvertement évoquer la pollution marine et la pêche intensive néanmoins, le rappeler est toujours une excellente chose. Là où la déception arrive, c’est que jamais le film ne va jamais au-delà de : « Le monde de la surface pollue nos mers depuis bien trop longtemps !  »
Cela dit, je reste compréhensif sur cet aspect puisqu’il s’agit avant tout d’une origin-story et très certainement que dans un second opus, maintenant qu’Arthur Curry est devenu Roi, le sujet sera évoqué avec plus d’attention, comme ça sera le cas, dans une autre mesure dans Black Panther 2. C’est du moins ce que laisse sous-entendre la scène post-générique à l’ONU.

Aquaman : Roi des Clowns

Concernant le personnage d’Aquaman, il est vrai qu’il y a une certaine frustration, comme si les scénaristes ne croyaient pas au sérieux que pourrait dégager le personnage. Jason Momoa est donc souvent réduit à la brute épaisse, sans une once d’intensité émotionnelle (même lorsqu’il retrouve sa mère, on peine à croire à l’émotion qu’il l’habite). Il faut dire que Jason Momoa n’est pas Joaquin Phoenix ou Tom Hanks et les nombreux dialogues kitchs/ répliques clichées, dignes des plus grands nanars des années 80, n’aident pas non plus l’acteur à se démarquer. D’ailleurs, la production DC Comics se revendique parfois comme telle – Dolphren Lungdren n’est pas là par hasard – et on peut également le constater à la fois dans son schéma scénaristique ou certaine choix de mises en scène (cf. la scène au ralenti où Arthur sort de la cascade avec le trident, pour ne citer que celle-ci). Pas sûr donc, que cela servira la carrière de Momoa On voit comment Norris, Van Damme et Seagal en sont réduits aujourd’hui.
L’iconisation du héros est également assez risible, si, comme je le disais plus haut, l’image d’Aquaman sortant de l’eau à la fin du film est magnifique, la phrase qui l’accompagne :
« Je suis Aquaman » est terriblement ridicule.

Enfin, sur le reste des personnages, peu de surprises. Les méchants sont méchants, les gentils sont gentils, tout est attendu alors qu’on espérait quelques révélations, trahisons, notamment avec Vulko qui, finalement, se révèle être un gentil mentor, sans défauts.
Les changements de camp sont aussi rapides que l’éclair (Xebel, les Fishermen) et on a la sensation que les personnages n’ont aucun caractère, aucune force, aucune volonté et suivent une ligne dictée par des scénaristes, dont le souci n’était apparemment pas celui de donner à leurs protagonistes des psychologies plus complexes, plus ingénieuses.
Petite mention spéciale à Temuera Morrison (Thomas Curry) touchant, dans ce rôle de père guettant le retour de sa femme, tous les matins, au lever du soleil, jusqu’à ce dénouement, déchirant (les plus sensibles d’entre vous, verseront une petite larme).

Le problème Black Manta

Super-vilain introduit pour le second volet et dans lequel il aura la vedette, la sous-intrigue Black Manta est assez répétitive. Par deux fois, ce dernier n’aura qu’un seul objectif : tuer Aquaman. La première fois car il est un obstacle à sa mission, la seconde par revanche (sans compter la scène post-générique, où on le voit plus déterminé que jamais à retenter sa chance. Persistant le coco.). Tout cela contribue à un problème. Les scénaristes ont véritablement décrédibilisé Black Manta en tant que Némésis dans ces deux situations, et on se demande à quoi bon s’acharner, il n’a clairement pas le niveau requis. Ainsi, sa prochaine attaque devra être décisive, si on veut le prendre au sérieux, un temps soit peu, être la hauteur des enjeux et offrir une véritable résistance face à Aquaman, pour le faire plier, douter. Pour l’instant, je ne vois que de la rage et c’est cette colère qu’il faut dompter, pour éviter les faux pas. La clé de la réussite : la concentration.

En conclusion, du très bon (la séquence d’action en Italie, les flashbacks sur l’Atlantide), du bon (les duels entre Arthur et Orm, chorégraphiés avec intelligence) et du moins bon (la bataille finale parait parfois brouillonne dans sa construction et bâclée de part sa durée), Aquaman divise et continuera de diviser. Si le film est épique à souhait, avec une vraie ambition sur les visuels, la production de James souffre d’un scénario (dialogues compris) frisant le nanardesque et d’un traitement des personnages assez simpliste.
En gros, Aquaman manque de profondeur (oui, je sais, j’avais promis, mais c’était trop tentant !).
Sauveur du DCEU ? N’abusons pas. Avenir prometteur ? Oui.

Retrouvez ici, mon reportage sur le film Aquaman, en compagnie de la voix française de Jason Momoa, Xavier Fagnon :

 

 

 

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