EDMOND : UN PROJET HÉROÏQUE ET ROMANTIQUE

LE CAPITAINE CINEMAXX A VU – EDMOND * SANS SPOILERS *

À l’origine, le scénario d’Edmond avait bel et bien été écrit pour le cinéma, mais face à des producteurs frileux (étonnant !), Alexis Michalik pris la décision d’adapter son script pour la scène. Un triomphe ! Victorieux de 5 molières, le projet Edmond acheva alors de convaincre ces messieurs de la production, y voyant dans ce spectacle vivant séduisant et enchanteur, la garantie d’un nouveau succès. Et Dieu merci pour le 7ème art, car Edmond est un petit bijou cinématographique.

Le film retrace l’incroyable histoire d’Edmond Rostand, poète raté, ayant pour impossible mission d’écrire une pièce de théâtre en trois semaines, avec dans le rôle-titre, celui de Cyrano de Bergerac, le sulfureux Jean Coquelin (admirablement interprété par Oliver Gourmet). En panne d’inspiration depuis plusieurs années, mais poussé par la talentueuse Sarah Bernhardt (Clémentine Salarié) et ses multiples rencontres, Edmond Rostand retrouvera, peu à peu, l’impulsion artistique, dont il désespérée le retour.
L’amour de son ami Léo (Tom Leeb) pour la jeune et ravissante habilleuse, Jeanne (Lucie Boujenah), sera sa principale source d’inspiration et c’est au travers de « trahisons » et de lettres passionnées pour cette dernière, que le jeune Edmond Rostand fera naître la passion romantique de son héros.
Le tenancier (Jean-Michel Martial) sera également un autre vecteur d’aspiration, notamment pour concevoir le caractère physique et moral de Cyrano, tandis que ses moments en la compagnie d’Honoré, seront, en outre, l’occasion pour lui d’imaginer des scènes cultes de la pièce, dont le célèbre duel entre Bergerac et Le Vicomte, rythmé par ses trois tirades mythiques qu’il conclut par « […] Qu’à la fin de l’envoi, je touche ».
Toutefois, il devra aussi composer avec une femme jalouse mais bienveillante (Alice de Lencquesain), l’arrogance de Maria Legault alias Roxane (Mathilde Seigner), les remarques désobligeantes de l’impétueux Georges Feydaux (Alexis Michalik), des acteurs qui perdent espoir ou ne savent pas interpréter (ex. le fils de Jean Coquelin, Igor Gotesman) et les problèmes financiers du père Coquelin, représentés par deux producteurs véreux (Simon Abkarian et Marc Adreoni), Ange et Marcel Fleury, qui produiront la pièce de Cyrano de Bergerac. On peut d’ailleurs y voir une représentation allégorique des producteurs ayant refusé le projet Edmond au cinéma, réticents, et finissent, malgré tout, conquis par ce chef-d’œuvre.
Une mise en abîme donc, sublimée par Alexis Michalik, qui livre-là une œuvre cinématographique intelligente, pleine de bon sens, drôle et poignante, par le biais de dialogues enflammés, dynamiques et authentiques (cf. la tirade du nez entre Edmond et Coquelin, la scène du balcon avec Edmond, Léo et Jeanne…) mais aussi d’une réalisation astucieuse, qui démontre parfaitement les difficultés rencontrées par Edmond et la pression permanente qu’il subissait pour mener son projet dans les délais impartis. On retrouve également les meilleurs moments de Cyrano de Bergerac sur scène (tirade du nez, le duel, la déclaration…), que le cinéaste laisse exister, pour les amoureux de la pièce.
* spoilers * La scène finale, celle où Cyrano dévoile son amour pour Roxane, est déroutante mais subtile puisque le décor de théâtre se transforme en un décor de cinéma, évinçant le public, afin de donner un cadre plus intimiste à une des déclarations les plus belles, les plus éloquentes, les plus romantiques au monde. Émouvant. * fin spoilers *

On prend également un énorme plaisir à retrouver le Paris de la Belle Époque et une galerie de personnages qui ont marqué l’histoire de la Capitale, même si elle est cependant moins importante que celle de Dilili à Paris.

En conclusion, Edmond est à l’image de Cyrano de Bergerac, un chef-d’œuvre, tant sur le plan scénaristique, que de la mise en scène. Un film héroïque et romantique, sur la vie d’un poète audacieux à l’imagination débordante (belle ironie !), trépident d’ingéniosité et sur la naissance d’un troubadour au grand cœur, timide mais valeureux. En somme, le long-métrage d’Alexis Michalik nous présente deux héros, deux âmes chevaleresques, à l’identité unique, puisque Cyrano naît des fantasmes et des désirs d’Edmond.
Et finalement, la naissance de l’un et la renaissance de l’autre. Cyrano est Edmond. Edmond est Cyrano.
Concernant les comédiens, Thomas Solivérès est véritablement touchant dans le rôle d’Edmond Rostand, tandis qu’Oliver Gourmet est plus que convaincant, à la fois dans l’incarnation de Jean Coquelin, que dans Cyrano de Bergerac. Les autres acteurs ne sont pas en reste, que ce soit les protagonistes principaux ou les simples apparitions, chacun offre une interprétation précise et délicate de son personnage.

Et je vous quitte avec une de mes tirades préférées de Cyrano de Bergerac : « Le panache, n’est pas la grandeur mais quelque chose qui s’ajoute à la grandeur, et qui bouge au-dessus d’elle. C’est quelque chose de voltigeant, d’excessif – et d’un peu frisé […], le panache c’est l’esprit de bravoure. […] Plaisanter en face du danger c’est la suprême politesse, un délicat refus de se prendre au tragique ; le panache est alors la pudeur de l’héroïsme, comme un sourire par lequel on s’excuse d’être sublime. »


 

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