ALITA, BATTLE ANGEL : NOUVEL ESSAI POUR UNE ADAPTATION JAPONAISE

LE CAPITAINE CINEMAXX A VU – ALITA : BATTLE ANGEL * SPOILERS *

Je ne vous cache pas l’appréhension qui était mienne concernant Alita : Battle Angel, ces derniers mois.
Les adaptations américaines de mangas japonais sont souvent des déceptions (et des échecs cuisants, qu’ils soient critiques ou financiers) et, ici, l’ambition était telle que confier près de 200 millions de dollars à un réalisateur habitué au petit budget, n’est jamais une idée brillante, combien de cinéastes se sont cassés la figure en essayant.
De plus, en toute confidence, je ne suis pas un grand amateur/fan de la filmographie de Robert Rodriguez, son travail m’ayant toujours laissé de marbre.
Et, finalement, malgré quelques défauts ici et là, que nous allons évoquer, bien entendu, Alita : Battle Angel se révèle une bonne surprise. Robert Rodriguez livre, en effet, une œuvre admirable, un blockbuster divertissant, dans le bon sens du terme, un blockbuster à l’énergie folle, parfois même, indomptable et imprévisible, à la richesse visuelle abondante.

Robert Rodriguez feat James Cameron

La première chose qui frappe dans Alita Battle Angel, ce sont ces effets spéciaux et sa photographie.
Alita : Battle Angel a une identité visuelle très affirmée, peut-être la plus aboutie de la filmographie de Robert Rodriguez, une photographie vacillant entre le mécaniquement sale/éblouissant/hardcore et le divin, avec cette Cité Céleste inaccessible, triomphante au-dessus d’un autre monde, plus abrupt, tel un Olympe auquel les mortels ne sont jamais conviés. D’ailleurs, Robert Rodriguez ne montre jamais réellement Zalem, il la suggère, permettant ainsi de donner à ce lieu un caractère mystique et une dimension d’imprenabilité, d’impénétrabilité, appuyés par des flashbacks et une séquence finale, où les personnes ayant tenté d’y pénétrer sans autorisation ont tous échoué.
Seule Cité Céleste survivante de La Terre, elle est d’autant plus précieuse qu’il faut la protéger, comme une dictature en place et créer une hiérarchie, où seuls les méritants pourraient avoir une belle vie, écho à notre société actuelle.

Regardez-moi ce plan, ces couleurs ! Ces nuages ! Quelle beauté !

Les décors aussi sont grandioses. À l’instar de Star Wars, la quasi-totalité des décors d’Alita : Battle Angel, ceux en plein cœur de la ville d’Iron City, ont été construits de toutes pièces (ici à Austin dans les hangars de Robert Rodriguez) et, les fonds verts ainsi que cette sensation du tout numérique sont donc moins lisibles à l’écran, agréable pour mieux appréhender le spectacle devant nos yeux.
Cependant, comme très souvent dans ce cas, on sent les acteurs renfermés dans des décors linéaires, suivant des chemins précis, mécaniquement (jeu de mots), un sentiment d’enfermement qui, cela dit, traduit parfaitement ce que ressentent les personnages, prisonniers d’une ville où les espoirs sont limités.
À noter que la 3D en salles normales est affreuse et je regrette de ne pas avoir eu accès à la salle ICE, le soir de ma séance, qui aurait offert une meilleure lisibilité de l’image et un côté immersif, pas désagréable dans ce genre de blockbuster.

Concernant les « costumes » et design des personnages, les pièces d’Alita sont une merveille de composition artistique.
Son premier corps à d’abord un aspect enfantin, fragile avec des couleurs pures (le blanc) qui mettent en lumière l’innocence du personnage, liée à sa perte de mémoire et ses premiers pas dans un monde qu’elle doit redécouvrir, de nouveau concevoir. Tandis que son second corps, plus organique, donne alors la sensation d’une femme accomplie, la naissance d’une guerrière.
Deux corps donc, pour deux modes de vie différents, qui interviennent à des moments précis de son histoire. Une évolution corporelle qui a du sens et n’est pas un choix scénaristique purement esthétique.
Pour les autres personnages, chacun a un corps « gadgétisé » à son effigie, toutefois, celui de Zapan est celui qui retient le plus l’attention. Son corps possède, en effet, des motifs d’anciennes cultures (?) mayas ou incas intrigants (et une épée à l’allure persienne), comme s’il s’imposait comme le digne représentant d’anciennes civilisations disparues et voulait en perpétuer la grandeur.


Hugo et Alita : La Bataille des Cœurs

L’histoire d’amour entre Alita et Hugo n’est pas si hasardeuse et longuette qu’on ne peut le lire dans certaines critiques. Et si l’interprétation de Keean Johnson laisse à désirer certes, leur relation est notamment là pour apporter un aspect, un caractère plus humain à Alita, afin de s’attacher émotionnellement à un personnage qui peut rapidement devenir antipathique, de par sa structure robotique.
Et si les quelques rebondissements liés à cette intrigue amoureuse sont parfois prévisibles, dans sa composition scénaristique, elle épargne néanmoins le tristement célèbre « happy-ending », offrant une dimension plus profonde à cette amourette, dont le dénouement final changera sa vie et les choix futurs d’Alita, à jamais.

Le Motorball : source de motivation

Je n’ai jamais lu un seul manga d’Alita : Battle Angel, mais de ce que j’ai pu lire çà et là, le motorball est un élément essentiel et capital dans le développement/reconstruction d’Alita, puisqu’elle est liée à l’arrivée de Jashugan (qu’on aperçoit dans le film brièvement et désigné comme le Super-Champion), qui va bouleverser sa vie.
Ici, le Motorball est davantage un artifice, un simple élément spectaculaire, mais entre nous, tellement spectaculaire qu’on lui pardonne ses « oublis thérapeutiques ».
La course-poursuite entre Alita et les autres
« hommes-machines » est d’une beauté artistique à couper le souffle, chaque mouvement étant choisi pour apporter au public un spectacle grandiloquent, au travers donc, des chorégraphies sublimes et d’une maîtrise exceptionnelle, alternant entre ralentis et mouvements ultra-rapides, pour une immersion plus haletante d’un sport dangereux aux conclusions indéterminées.
Cette séquence est d’autant plus palpitante que son rythme a un enjeu double : faire ses premiers pas afin d’espérer devenir championne et ainsi grimper jusqu’à la Cité Céleste de Zalem, mais aussi sauver la vie d’Hugo, pris en chasse par Zapan en pleine partie de Mortorball, qui se transforme en seconde course-poursuite dans Iron City.

À la fin du film, Alita se sert du Motorball pour asseoir sa réputation et défier l’autorité suprême, celle de Zalem. Un défi, comme un appel au soulèvement, à la révolution, l’épée d’Alita tournée vers les cieux. Une épée aux teintes bleutées, synonyme de rêve et vérité, deux entités attribuées à la couleur bleue et que recherche Alita : vivre son utopie et exposer l’évidence au peuple d’Iron City.

Alita : Rogue Gallery

La promotion d’Alita : Battle Angel a mis l’accent sur une galerie de super-vilains assez vaste, malheureusement, pour un résultat un poil décevant. Le film de Robert Rodriguez manque peut-être d’un véritable boss final afin de mettre davantage le personnage d’Alita à l’épreuve. La jeune femme est tellement puissante qu’on ne tremble jamais vraiment pour elle (sauf lors de la grande scène du Motorball, où la tension est suffisamment maîtrisée pour nous faire oublier cela, grâce, notamment, à l’envergure dramatique des enjeux) et les nombreux méchants qu’elle affronte sont alors tournés en ridicule (Zapan, Grewishka) ou meurent en l’espace d’une scène (Zyssiana), au point d’être frustré par de si courtes apparitions.

Concernant Mahershala Ali, je suis assez mitigé quant à sa performance. Immense acteur au charisme certain, Ali est, ici, étrangement en retrait, moins à l’aise, à la limite de la caricature. Toutefois, malgré ces défauts apparents, à chacune de ses apparitions, par sa posture, son charisme, l’acteur crève l’écran et, peu d’acteurs peuvent se targuer de sauver l’interprétation d’un personnage en ne comptant juste que sur leur « gueule ».

En conclusion, intelligent, malgré ses petites imperfections, notamment dans ses dialogues à la teen-movie, Alita : Battle Angel se révèle, lors de ses séquences d’action, aux visuels détonants et au rythme absolument fou, un blockbuster aussi divertissant que jouissif.
Le film de Robert Rodriguez transporte, séduit, particulièrement au moyen de techniques de réalisation/motion, performance capture uniques, affichant un cachet indéniable à une production qui repousse donc les limites du cinéma.
À ce jour, on peut donc affirmer qu’Alita : Battle Angel est le blockbuster américain adapté d’un manga japonais le plus abouti et, maintenant que les bases sont posées, la suite est désormais très attendue, afin de confirmer les attentes.

2 commentaires sur “ALITA, BATTLE ANGEL : NOUVEL ESSAI POUR UNE ADAPTATION JAPONAISE

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