STAR WARS – L’ASCENSION DE SKYWALKER : LA CONCLUSION DE LA CONCLUSION

*SPOILERS*

Le Réveil de la Force, Les Derniers Jedi, autant dire que les deux premières productions de cette nouvelle trilogie auront divisé les fans hardcore de Star Wars, les simples amoureux de la franchise et les nombreux cinéphiles de la planète. Avec L’Ascension de Skywalker, le challenge était double pour J.J Abrams : raccrocher les wagons entre les idées imposées par Rian Johnson dans Les Derniers Jedi et les siennes et, conclure la saga de manière satisfaisante, en essayant de ne froisser personne. Une cause perdue d’avance ? Réponse.

L’ascension de la vitesse lumière

Premier constat, L’Ascension de Skywalker est un film qui va vite, trop vite. D’entrée, J.J Abrams plante son décor et évince la quasi-totalité du travail de Rian Johnson sur Les Derniers Jedi, d’un simple revers de la main ou, a contrario, tente de rebondir sur des idées qu’il ne partageait pas. Plus par obligation, afin de garder, malgré tout, une certaine cohérence. Ainsi, lorsque le générique débute, nous pouvons lire : « Les morts parlent […], Palpatine est de retour. ». Oui, je vous le concède, c’est assez violent. Vous vous prenez le retour d’un des méchants les plus emblématiques de la saga Star Wars en pleine figure, brutalement, sans une once de subtilité, comme si cela était acquis depuis longtemps.
Annoncer le retour de Palpatine dans une bande-annonce était déjà une erreur. Introduire son grand vilain dans un générique introductif en est une autre. Cette introduction sera à l’image de son scénario : maladroit. En effet, J.J Abrams ne va jamais s’embarrasser de détails et foncer droit devant.
Foncer. Comme le Faucon Millénium en vitesse lumière. L’abondance de trous scénaristiques appuie cette sensation de rapidité, cette sensation d’un fourre-tout à la cuisson non-programmée. Les personnages vont d’un point A à un point B, dans un enchaînement de situations au petit bonheur la chance, dans un déluge de facilités et d’incohérences aussi massives que l’Étoile de la Mort. Deux exemples.

  1. Le film débute avec Kylo Ren sur une planète inconnue. Il vient récupérer un « Orientateur Sith », capable de tracer la planète où se cache Palpatine.
    Aucune explication sur la manière dont ce dernier a obtenu l’information sur le retour de Palpatine, ni même comment il fut au courant qu’un « orientateur » existait. Une fois encore, tout est acquis néanmoins, le spectateur, lui, subit cette avalanche d’informations qu’on lui impose avec mépris et insolence.
    Objet qui, par ailleurs, se trouve en pleine « forêt », au milieu des arbres. Pourquoi s’encombrer à faire une séquence au sein d’un temple piégé à la Indiana Jones, quand il suffit de placer une stèle au milieu d’une forêt qu’on active avec ses doigts ?
  2. Rey arrive sur une planète désertique (dont j’ai oublié le nom, pardonnez-moi) et, cherche, elle aussi, des indices sur la fameuse planète Sith. Heureusement, la chance est de son côté. Ensevelis par des sables mouvants, la jeune Jedi et ses amis tombent alors, littéralement, sur une galerie souterraine. C’est ici, qu’ils trouveront une dague, à même le sol, laquelle leur permettra de trouver la-dite planète. Elle est pas belle la vie ?

Cette vitesse scénaristique est l’erreur principale de L’Ascension de Skywalker. Elle empêche, à la fois, de savourer le film dans son entièreté, et de s’investir émotionnellement dans ce que vivent et ressentent les personnages, lors de moments dramatiques.
Un plan sur la défunte Leïa, un échange vulgaire entre Han et Ben sur sa mort, un plan sur Chewie qui pleure, voilà comment on traite la disparation d’une autre figure emblématique de la saga.

L’Ascension de Skywalker qui se veut la fin du ère, enchaîne son fan-service prétentieux, sans parvenir à émouvoir. Là, où Le Réveil de la Force livrait une partition nostalgique intelligente, Star Wars IX ne fait que copier bêtement des images, des situations déjà vues, sans une once d’originalité, sans chercher à transcender la fibre nostalgique en quelque chose d’authentique. La séquence qui reflète ce manque de créativité est celle où, pour la énième fois, Palpatine est mis en échec par… ses propres éclairs. Ramener Palpatine, simplement pour une mort par « électrocution », n’est-il pas un aveu d’échec, celui d’un fan-service outrancier sans ambition ? Cela ne décrédibilise t-il pas un méchant si emblématique ? Bien-sûr que si. Au fond, remettre Palpatine sur le devant de la scène révèle un souci Hollywoodien majeur : la difficulté pour cette industrie de créer de nouvelles figures du mal, marquantes, capables de traverser les âges. Ce n’est pas anodin si Vador est présent dans Rogue One ou si Michael Myers faire son retour dans des séquels franchement passables. Symptomatique d’un système qui s’épuise. Convaincu qu’un Snoke n’avait pas le charisme pour séduire (et Kylo Ren n’a jamais été considéré comme un vilain à part entière), Rian Johnson s’en est lamentablement séparé, obligeant à faire revenir un Palpatine, qui n’avait sûrement rien demandé. Et, il était trop tard pour tenter de faire apparaître un Dark Plageuis.

Enfin, cela pose un autre problème. Dans Les Derniers Jedi, Snoke souhaitait voir mourir Rey. Palpatine lui, a besoin d’elle vivante. Si Snoke était une création de Palpatine et que ce dernier le manipulait, expliquez-moi où est la cohérence, s’il vous plaît ?

Un j’en-foutisme que l’on retrouve jusque dans la réalisation. Paresseux, J.J Abrams n’obtient jamais ce qu’il avait atteint avec Le Réveil de la Force : le sublime, l’iconique. S’il y a quelques belles images, renforcées par une photographie alléchantes et la symphonie magistrale de John Williams, ainsi que des jeux d’échelle très intéressants, le tout paraît parfois bâclé. Le combat au sabre laser entre Kylo Ren et Rey en est la preuve. Un affrontement mou du genou, qui ne dégage aucune énergie, aucun dynamisme flamboyant, aucune dureté dans le mouvement. On peut reprocher énormément de choses à La Revanche des Sith, mais le duel entre Anakin et Obi-Wan est de loin le combat au sabre laser le plus intense, le plus violent, le plus émouvant de la saga, où toute la dramaturgie du film prend forme, au travers des excès de rage qui se traduisent par des mouvements d’une extrême fureur. Une scène également chorégraphiée au millimètre près.
On notera également le peu d’inventivité de la bataille finale, d’une staticité effrayante. Où est l’imagination ?

La seule chose dont on soit certain avec ce scénario alambiqué c’est que l’eau, ça mouille.

Les origines de Rey

Les origines de Rey était une partie essentielle de cette nouvelle intrigue. Dans Star Wars VIII, on apprenait de la bouche de Kylo Ren que les parents de Rey n’était que de simples paysans et, par conséquent, qu’elle n’était « rien ». Un semi-mensonge sur lequel va rebondir J.J Abrams pour créer la révélation tant attendue : Rey est la petite-fille de Palpatine. Là encore, peu d’explications. Palpatine a donc eu un enfant, c’est acquis, un fait avéré, ne cherchez pas à comprendre, nous dit-on. Cette révélation, certains l’accepteront, d’autres moins. Pour ma part, c’est une déception. J’appréciais le fait que Rey ne soit « rien ». Cela la rendait unique, précieuse, comme l’était autrefois Anakin, esclave de Tatooïne, devenu une légende.

La quête identitaire de Rey trouvera donc sa conclusion à la fin du film. Lorsqu’une vieille dame lui demandera son nom, elle répondra : Skywalker. Une manière pour Rey d’honorer une mémoire, une histoire, en somme, sa vraie famille. Une ascension pour la jeune femme qui ne sera plus une inconnue. Elle possède maintenant un passé, un héritage, tout ce qui compose une identité et, pour laquelle, elle devra construire un futur.

Kylo Ren : La figure du Mal ?

Tiraillé entre le désir de renouer avec les vestiges d’un passé tragique et la petite lumière étincelant encore dans son cœur, Kylo Ren aura désespérément tenté de se frayer un chemin entre l’héritage de sa famille et son émancipation soudaine. Finalement, Ben suivra – plus ou moins – le même parcours que son grand-père Vador, jedi prometteur ayant basculé du côté obscur, promu à la tête d’un Empire, avant un acte de rédemption qui le ramènera vers la lumière et mettra fin au règne d’un Empereur tyrannique. Malheureusement, si la rédemption de Dark Vador est une image forte, poignante, bouleversante, celle de Kylo Ren souffre d’une écriture si maladroite, que son impact émotionnel s’en trouve amoindri. Tout d’abord, on ne sait pas d’où ce revirement prend sa source : est-ce parce que Rey lui sauve la vie ? Est-ce parce qu’il ressent la mort de sa mère et que cette mort l’atteint au plus profond de son être ? Est-ce la conversation avec le fantomatique Han Solo ? Cette prise de conscience est assez floue et brusque. Ensuite, son sacrifice. Être porteur de la Force, ne veut pas dire maîtriser des techniques ancestrales, en quelques secondes. Si Rey parvient à guérir autrui, en lui donnant une part de son énergie vitale, cela requiert un entraînement intensif. Certainement des semaines et des semaines de travail. Ridicule donc, lorsque Kylo Ren transfère toute son énergie vitale à Rey, simplement en fermant les yeux et, en moins d’une demi-minute. Comment ressentir de l’émotion pour une telle séquence, avec des facilités aussi flagrantes, supposées être jolies ?

. Le problème du casque

Lorsque Disney a dévoilé la première bande-annonce de Star Wars : L’Ascension de Skywalker, beaucoup avait décrié le fait que Kylo Ren remodèle son casque, qu’il avait abandonné dans le volet précèdent. C’était, d’ailleurs, une scène intéressante des Derniers Jedi puisque Kylo fracassait son casque après les propos d’un Snoke le traitant d’« enfant avec un masque ». Et, les raisons qui poussent Ren à reprendre son casque, un an après (un an!!!), ne sont jamais réellement données. Il faut, une fois de plus, supposer.

Leïa et la Force

C’est une des scènes des Derniers Jedi qui a fait hurler la planète Star Wars : Leïa utilise la Force.
Comment aborder cette mascarade ? Eh bien, Leïa est une Skywalker. Il n’y aurait aucune raison pour que la Générale Organa ne puisse pas, avec un entraînement, développer des capacités liées à la Force. La voir utiliser des pouvoirs est donc plutôt cohérent. Par ailleurs, je vous rappelle cette phrase prononcée par Luke à Leïa dans Le Retour du Jedi : « La Force est puissante dans ma famille. Mon père a ce don. J’ai ce don, ma sœur l’a aussi. Vous avez ce pouvoir aussi. ».

Mais, effectivement, cette séquence dans SW8 arrive comme un cheveu sur la soupe, de façon très maladroite, tellement maladroite que J.J Abrams devra donner du poids à cette révélation – que tout le monde a semble-t-il oublié -, au travers un flashback, afin de crédibiliser aussi le travail de Rian Johnson. Flair play sur ce coup, le J.J !

Captain Phasma, Snoke et les Chevaliers de Ren

Captain Phasma : Introduit dans Le Réveil de la Force, abandonné dans Les Derniers Jedi, le personnage de Captain Phasma était le lien entre Finn et son passé en tant que Stormtrooper. Si Star Wars VIII avait l’occasion d’approfondir cette relation et toute la « mythologie » entourant les Stormtroopers (recrutement, idéologie, organisation sectaire…), Rian Johnson reniera totalement le personnage créé par J.J Abrams.
On sent, par moment, ce regret dans L’Ascension de Skywalker. J.J tente, à plusieurs reprises, de réintroduire des idées qu’il aurait voulu développer avec Phasma, notamment lorsque Finn fait la connaissance d’une ancienne Stormtrooper.

Snoke : Après la disparition * de Snoke dans Les Derniers Jedi, énormément d’interrogations restaient en suspend. Qui était-il  ? D’où venait-il ? Comment a-t-il pervertit l’âme de Ben Solo ? Quel entraînement lui a-t-il fourni ? Autant de questions légitimes qui n’auront jamais de réponses et, balayées par une parole prononcée par Palpatine : « Snoke était une de mes créations ».
Une façon, la seule, de tourner la page Snoke. J.J n’avait pas trente six mille solutions. Toutefois, un goût amer persistera : qu’aurait fait le réalisateur de Snoke, si Johnson ne l’avait pas tué ?
Nouvelle preuve que la continuité entre SW 7, SW8 et SW9 avait ses limites.

  • Un petit mot sur la mort de Snoke et une question : comment un Maître Sith a-t-il pu se faire berner aussi aisément, et ne pas sentir que le sabre laser de Rey, à côté de lui, bougeait ? La mise en scène de sa mort est d’une incroyable stupidité.

Les Chevaliers de Ren : « Ce sont des démons ». C’est ainsi qu’un garde stormtrooper qualifie les Chevaliers de Ren, lors de leur première apparition dans Star Wars IX. Le ton était donné ! Et, on pensait bêtement en avoir une démonstration. Il n’en sera rien. Les Chevaliers de Ren sont réduits au rang de figurants puis, de chair à canon, dans une scène où Kylo Ren les affrontera et les terrassera, sans grande difficulté.
En me documentant, j’ai appris que les Chevaliers de Ren étaient composés d’apprentis déchus de Luke Skywalker, corrompus par Kylo Ren. Une piste jamais explorée et qui, pourtant, aurait offert un combat plus vif entre possesseurs de la Force.

Conclusion

Conclure une saga (y’avait-il une nécessité à conclure une trilogie qui possédait déjà sa propre fin ?), proposer sa version/vision d’une œuvre intemporelle, c’est admettre qu’on subira les foudres d’une certaine catégorie de personnes. Néanmoins, personne ne détient la vérité absolue.
Il y aura simplement des gens qui ont aimé. D’autres non.
Le cinéma, c’est avant tout une question de ressentis. Pour ma part, je n’ai jamais été attiré par Star Wars, ce n’est pas une franchise qui m’a transporté et, ce nouvel opus m’a déçu. J’ai expliqué mes raisons, j’ai argumenté avec le plus d’objectivité possible, parfois avec virulence, mais, je ne détiens pas la vérité. Je ne suis qu’un simple critique.
Si des gens ont été emballés par cette conclusion, qui suis-je pour juger ?
Le cinéma, c’est également un attachement. Ceux qui ont été émus, ont trouvé satisfaction dans cette fin, ce sont, pour la plupart, des gens, des fans, qui sont attachés à cette saga depuis plus de 40 ans, aux Skywalker, aux multiples personnages qui ont traversé la saga. Bref, à tout ce qui entoure et a fait le succès de Star Wars. Pour être ému, il faut avoir un passif. Je n’en ai pas. Moins que pour Avengers : Endgame qui, pour le coup, m’a vraiment bouleversé (malgré ses défauts).

J’attends néanmoins, avec impatience, une nouvelle trilogie Star Wars.
Cependant, Star Wars peut-il tenir un récit complet sans Empire ou Premier Ordre ? Car, la franchise ne reposait jusqu’à présent que sur des oppositions politiques, une opposition entre une Résistance et un Empire, plus que sur des oppositions idéologiques entre Jedi et Sith. Suivre, en tout simplicité, un Jedi ou un groupe de Jedi poursuivre des Siths, cela sera t-il suffisamment attractif ?

Je repense à cette image de l’arène, où les Siths acclamaient Palpatine et son plan machiavélique. C’était la première fois que l’on voyait autant de Siths, réunit en un même endroit. C’est là qu’on voit que cette trilogie est peut-être passé à côté de quelque chose… quelque chose de neuf et d’inédit.

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