Année spéciale, vous en conviendrez. Plusieurs mois sans cinéma, des festivals annulés, des films reportés, la COVID aura eu un impact catastrophique sur une industrie pourtant essentielle.
Malgré tout, je vous propose de revenir sur mes coups de cœurs de cette année 2020 car, certains studios ont pris le pari de sortir des films en pleine crise sanitaire pour proposer aux spectateurs un large choix d’œuvres cinématographiques. Une offre riche, une belle année de cinéma par ailleurs, quoi qu’ont pu en penser certaines personnes.
Je rappelle que ce classement est subjectif, en lien avec mes goûts personnels. Pas la peine donc, de crier au scandale ou à l’hérésie si vous ne voyez pas tels ou tels films dans mon Top 10.
1. Adieu les cons d’Albert Dupontel
Albert Dupontel distille tous les maux de notre société et met en scène le mal-être social dans un film tendre et mélancolique, où l’amour finit par triompher sur la connerie humaine.
Virginie Efira et Albert Dupontel forment un duo détonnant, auquel vient se greffer le personnage hilarant de Mr. Blin (Nicolas Marié). Mais s’il provoque le rire, il ajoute également une dimension tragique au film en confrontant le spectateur au changement. Au changement sociétal mais surtout environnemental, où les infrastructures modernes – des temples dédiés à la surconsommation – poussent sur des terres autrefois saines. Symbole d’un capitalisme ambiant, qui ronge notre monde.
Quant à la mise en scène, elle est brillante. Dupontel joue avec les codes de la comédie romantique pour livrer sa propre version d’une histoire sentimentale et choisit des happy-ends surprenantes, à la fois d’une sensibilité pure mais aussi d’une grande violence émotionnelle. On ne ressort pas indemne de ce film.
La photographie, elle, a cette aura jaunâtre qui dévoile un charme irréel à Adieu les cons. Pourtant, les images dépeignent une réalité brutale. Notre réalité.
2. TENET de Christopher Nolan
Christopher Nolan s’amuse avec le Temps et notre perception des évènements, dans une succession de mises en abyme ingénieuses et spectaculaires. Une véritable immersion cinématographique, qui prend le spectateur à revers.
Mais TENET est aussi une histoire d’amour. Nombreuses sont les critiques qui ont souligné un manque d’émotion chez TENET. Or, le film est truffé de moments sensibles, intenses et douloureux. La relation naissante entre Kat et Le Protagoniste, la relation toxique entre Kat et Andrei Sator (Kenneth Branagh) et l’interprétation poignante de Debicki dont la seule motivation est de sauver son enfant, le désir du Protagoniste d’offrir à Kat une seconde chance dans la vie, la dernière séquence entre Neil et Le Protagoniste, autant d’éléments scénaristiques, de situations, de scènes, qui prouvent que TENET est un long-métrage bien plus profond qu’il n’y paraît. Et même si le jeu de certains acteurs paraît froid, il y a dans cette froideur des nuances perceptibles. Ressentez !
3. Jojo Rabbit de Taika Waititi
Jojo Rabbit est comédie satirique emprunt de poésie. Mais au-delà de ce lyrisme, l’œuvre de Taika Waititi dépeint aussi la violence des mots, des croyances et de la guerre. En effet, le réalisateur n’oublie jamais de confronter le spectateur à la dureté des propos antisémites et de l’absurdité qu’impose les conflits armés. Toutefois, et c’est toute la beauté de Jojo Rabbit, il y a une profonde leçon d’humanité à en tirer. En ces temps troubles que nous vivons, le long-métrage de Taika Waititi offre une lueur l’espoir, un magnifique échappatoire et nous rappelle que seul l’Amour compte, que seul l’Amour nous sauvera.
Avec Jojo Rabbit, Waititi prouve qu’il est un grand cinéaste indépendant. Sa caméra est passionnante à suivre et révèle un véritable sens du cadre, au travers une mise en scène épurée et séduisante. D’ailleurs, sa réalisation lui permet à la fois d’appuyer certains comiques de situation ou, à contrario, d’accentuer la cruauté et l’horreur de la guerre. Le film possède une richesse visuelle insoupçonnable.
En somme, Jojo Rabbit est une fable onirique, une ode à la vie et à l’amour, dans laquelle se mêlent comédie satirique et drame historique avec une subtilité rare.
Les comédiens y sont formidables : Scarlett Johansson, Roman Griffin Davis, Thomasin McKensie, Rebel Wilson et Archie Yates sont d’une justesse impressionnante, preuve aussi que Waititi est un excellent directeur d’acteurs.
Mention spéciale à Sam Rockwell, pathétiquement drôle et émouvant.
4. Miss de Ruben Alves & Soul de Pete Docter
[…] Ruben Alves transcende ce sujet à priori banal en sujet de société actuel, propose un regard neuf sur le concours Miss France et offre une morale évidente mais déchirante.
Miss est bouleversant. Alexandre Wetter, tout en délicatesse, s’impose à nous comme une évidence. Ce n’est que son premier film et, l’humanité qu’il dégage à l’écran, suffit à nous faire fondre en larmes dans les moments intimes. Oui, vous allez pleurer.
Abondamment.
Notamment parce que Miss est aussi dur, violent, à la fois dans ses dialogues que dans les situations vécues par les personnages […].
. Mon interview du réalisateur Ruben Alves et des comédiens Alexandre Wetter et Stefi Celma ainsi que mon avis complet sur le film sont à retrouver ici.
SOUL

À l’heure où la plupart d’entre-nous sommes confinés par un couvre-feu, sommes réduits au télétravail et que notre vie se résume pour beaucoup à : métro, boulot, dodo, Soul offre une réflexion spirituelle au sens de la vie, à ce que l’on souhaite en faire et à notre façon de percevoir le monde. Une évasion enrichissante, émotionnellement puissante, une aventure humaine hors du temps, où Pixar tente d’allumer/de raviver notre flamme.
Le film de Pete Docter joue sur plusieurs plans, entre réalité et monde abstrait dans un va et vient bouleversant et parfois même, angoissant. Des allers-retours entre plusieurs plans qui rythment un récit passionnant sur la condition humaine, sur nos rêves et nos inspirations, souvent tronqués.
Si Soul séduit par son propos, il charme également par sa richesse visuelle. Elle oscille entre animation en 3D et personnages en 2D, permettant d’accentuer l’aspect métaphysique du film. Comme chaque Pixar, Soul est coloré, créatif et inventif – dans les choix décoratifs, narratifs et de mise en scène. Le tout orchestré par une bande-originale merveilleuse, forte et audacieuse !
5. Police d’Anne Fontaine
[…] Anne Fontaine livre une adaptation efficace du roman d’Hugo Boris, pleine de tendresse et de sensibilité. La réalisatrice ne cherche jamais à coller à une actualité brûlante, à condamner un métier ou à redorer le blason de la Police. Elle est fidèle à son envie, conter une histoire cruelle et les conséquences sur la moralité d’individus pris au piège entre obligation et bienveillance. Et c’est une réussite !
. Ma critique complète (sans spoilers) est à retrouver ici.
6. L’Aventure des Marguerite de Pierre Coré
[…] Outre l’écriture, c’est aussi l’intensité du jeu de Lila Guéneau qui parvient à transmettre toutes ses émotions diverses et à alimenter le récit par sa présence dynamique et naturelle.
De plus, la comédienne a su capter l’Histoire, les enjeux et sa dramaturgie ainsi que la problématique « paternelle » pour interpréter deux héroïnes fortes et présenter aux spectateurs un regard nouveau sur deux époques différentes […].
. Ma critique complète (sans spoilers) est à retrouver ici.
. Mon interview avec le réalisateur Pierre Coré est à retrouver ici.
7. La Voie de la Justice de Destin Daniel Cretton & Dark Waters de Todd Hayes
2 films puissants, chacun dans un registre différent, qui séduisent notamment par leurs naturels, leurs dialogues ciselés et l’intensité de leurs propos.
La Voie de la Justice est une reproduction historique d’un fait réel, un film-procès comme il en existe beaucoup d’autres mettant en scène une personne noire accusée à tort.
Le réalisateur Destin Daniel Cretton a su saisir l’enfer d’un fait divers sordide pour la retranscrire avec un sens noble de la justice et toute la délicatesse qu’exige une telle retranscription. Jamais ce dernier ne va forcer le trait pour y apporter du pathos mais en explorant ses personnages de manière délicate et avec toute la force de conviction qui les caractérisent.
Les paroles sont fortes, détonantes et invitent à la réflexion sur une époque sombre des États-Unis. Une réussite !
DARK WATERS

Tiré là aussi d’un fait réel, celui du scandale écologique liant l’entreprise DuPont, Dark Waters dévoile aux yeux du monde une histoire nauséabonde qui remonte à plus de 70 ans.
Difficile de retracer un récit sur une si longue durée pourtant, Todd Haynes parvient à porter son scénario avec une grande intelligence et une maîtrise implacable. Il livre, frontalement, tous les détails historiques de cette affaire et les expériences macabres dont s’est rendu coupable DuPont, faisant des milliers de victimes américaines, encore aujourd’hui.
Et c’est cette conviction, cette détermination à révéler la vérité qui a fasciné Mark Ruffalo, pleinement investi dans le rôle de l’avocat Robert Bilott. L’acteur est au sommet !
On appréciera également le travail sur la photographie et la colorimétrie du film, grisâtre, impur, polluante, octroyant au film un côté anxiogène. Un aspect à l’image des évènements (oppressants) et des personnages (malades, froids, distants, piégés).
Tout le monde évolue dans cet univers glacial, où les sentiments sont biaisés, manipulés, oubliés et les familles désespérées. Jusqu’à la délivrance ?
8. Une Sirène à Paris de Mathias Malzieu
Charmant et d’une poésie folle, Une Sirène à Paris séduit par l’imagination débordante de son réalisateur. Que ce soit l’aspect dandy du film, son histoire d’amour impossible et sa mise en scène colorée et extravertie, Mathias Malzieu délivre une œuvre pure, émotionnellement puissante, à l’image d’une de ses propres histoires. Une allégorie sincère, enivrante, qui n’a de cesse de faire balancer notre cœur de Charybde en Scylla.
Une ode à l’amour à ne pas manquer !
. Mon entretien avec le réalisateur Mathias Malzieu est à retrouver ici.
9. Ip Man 4 de Wilson Ip
[…] Les 45 dernières minutes sont dantesques ! On retrouve le Ip Man qu’on aime.
Chorégraphiées par le légendaire Yuen Woo-Ping (Matrix, Kill Bill, Danny the Dog), les scènes de combats sont impériales, majestueuses, transcendantes. Les chorégraphies d’une maîtrise technique implacable et, Donnie Yen prouve, une fois encore, le talent qu’il possède pour les arts martiaux. Au fil des années, il n’a de cesse de nous impressionner par ses performances physiques et artistiques, et s’impose toujours un peu plus comme une star incontestable des arts martiaux à travers le monde.
La caméra, précise, ultra-dynamique, apporte aux scènes d’action une immersion totale et percutante, à l’image des coups portés, foudroyants […].
. Mon analyse complète est à retrouver ici.
. Mon interview avec la Présidente d’Eurozoom est à retrouver ici.
10. 1917 de Sam Mendès
Avril 1917 : Pris dans la tourmente de la Première Guerre Mondiale, Schofield et Blake, deux jeunes soldats britanniques, se voient assigner une mission à proprement parler impossible. Porteurs d’un message qui pourrait empêcher une attaque dévastatrice et la mort de centaines de soldats, dont le frère de Blake, ils se lancent dans une véritable course contre la montre, derrière les lignes ennemies.
Tourné en plan séquence (mais avec des raccords invisibles au montage), 1917 de Sam Mendès plonge le spectateur au cœur de l’enfer de la guerre en filmant aussi ses personnages au plus près. Deux techniques qui permettent une immersion totale, à la fois environnementale, physique et empathique. On découvre les lieux de conflits en même temps que son héros, on subit et éprouve son voyage ainsi que les émotions qu’il traverse et qui nous touchent également. Tout cela est possible grâce aux prouesses techniques du film et à sa reconstitution somptueuse et sa figuration importante, lesquels nous noient dans la folie et l’absurdité de la guerre.
On ne peut rester insensible face à ce film tonitruant, éprouvant, haletant. 1917 est une fresque historique épuisante, une aventure humaine douloureuse. À voir et à revoir.

Ils auraient pu être dans le classement :
. Loin de moi, près de toi de Jun’ichi Satô et Tomotaka Shibayama
. The Climb de Michael Angelo Covino
. Balle Perdue de Guillaume Pierret
Interview de Guillaume Pierret à retrouver ici.
Ma critique de Balle Perdue à retrouver ici.
. Le Prince Oublié de Michel Hazanavicius
. Play d’Anthony Marciano
Interview d’Anthony Marciano et Max Boublil à retrouver ici.
. Invisible Man de Leigh Whannell
. Lupin III de Takashi Yamakazi
Ma critique de Lupin III à retrouver ici.
. Light of my life de Casey Affleck
Ma critique de Light of my life à retrouver ici.
. Le cas Richard Jewell de Clint Eastwood.
. Les Traducteurs de Régis Roinsard
Ma critique de Les Traducteurs à retrouver ici.
. Mon Cousin de Jan Kounen
Ma critique de Mon Cousin à retrouver ici.
. Kogustaki Mucize de Mehmet Ada Öztekin
. Tyler Rake de Sam Hargrave
Flop 2020 :

. Peninsula de Sang-Ho Yeon
Ma critique de Peninsula à retrouver ici.
. Artemis Fowl de Kenneth Branagh
Ma Critique d’Artemis Fowl à retrouver ici.
. Wonder Wonder 84 de Patty Jenkins
. Tout Simplement Noir de Jean-Pascal Zadi
. Underwater de William Eubank
. Le Voyage du Dr. Dolittle de Stephen Gaghan
. Project Power de Henry Joost
. Mulan de Niki Caro
. Société Secrète de la Royauté de Anna Mastro
. Brutus V César de Kheiron
. Bloodshot de Dave Wilson (II)
Pas vu et à rattraper impérativement :
. Drunk de Thomas Vinterberg
. Da 5 Bloods de Spike Lee
. Capone de Josh Trank
. Adoration de Fabrice de Welz
. Un pays qui se tient sage de sage de David Dufresne
. ADN de Maïwenn
. Été 85 de François Ozon
. Une ode américaine de Ron Howard
. Effacer l’historique de Gustave Kervern et Benoît Delépine
. Calamity de Rémi Chayé
. Petit Vampire de Joann Sfar
. Mank de David Fincher
. Nomadland de Chloé Zaho
. Lucky Strike de Yong-hoon KIM
. Uncunt Gems de Benny Safdie et Josh Safdie
. Les filles du Docteur March de Greta Gerwig
Et vous, quels sont vos films coups de cœur de cette année ?