FUMER FAIT TOUSSER : LA CRÉATION DES COSTUMES BY JUSTINE PEARCE (ENTRETIEN)

Actuellement au cinéma, le nouveau film de Quentin Dupieux « Fumer fait tousser » fait parler de lui aussi bien pour son humour que pour ses costumes.  
Pour cette nouvelle interview consacrée aux « métiers de l’ombre », rencontre avec la costumière du film, Justine Pearce. Elle revient sur la création et la fabrication des costumes de la Tabac Force, du Lézardin, interprété par Benoît Poelvoorde, et de ses inspirations.

« Les inspirations de Quentin étaient des super héros japonais des années 70, ceux à l’origine de Bioman »

Comment avez-vous pensé et imaginé les costumes de la Tabac Force et quelles ont été vos inspirations pour les créer ? 
C’est une discussion que nous avons eu avec Quentin Dupieux, le réalisateur, et sa femme Joan, sa directrice artistique et cheffe décoratrice. Ils m’ont transmis leurs inspirations à travers des conversations et des images, cela m’a servi de base pour travailler et faire des recherches avec l’aide de mon assistante et bras droit. Nous avons ensuite parlé autour d’une planche d’intention qui étaient le fruit de cette recherche iconographique. Ensuite, j’ai fait un certain nombre de croquis et Quentin a choisi ceux qu’il préférait. À partir de ces croquis, j’ai fait, un travail de recherches sur les matières. C’est un travail commun, d’équipe. 

Ils ont une esthétique et des envies assez précises. J’ai travaillé autour de ce qu’ils me donnaient comme infos et de ce que ça m’inspirait pour créer ces costumes.   

Les inspirations de Quentin étaient les super-héros japonais des années 70, ceux à l’origine de Bioman, lui-même à l’origine des Powers Rangers. Il ne voulait pas que ses personnages ressemblent à des super-héros américains, mais plutôt travailler sur une base plus vintage avec des matières plus nobles. 

Quentin et moi-même, et c’est peut-être pour cela que nous nous sommes bien entendus, avons une esthétique qui n’est pas très américaine tout au moins pour ce projet. Il n’avait pas envie de matières cheap comme on peut le voir sur certains super-héros. Je suis donc partie sur du cuir stretch, une belle matière, extensible, originale, intéressante à l’image.

[…] Pour avoir des costumes en cuirs, extensibles, dans lesquels les acteurs puissent bouger et qu’ils soient beaux, c’était du travail à la conception et pendant le tournage.

Pour les bottes, nous avons fourni les cuirs que nous avons au préalable fait teindre par la peausserie avec laquelle nous avons travaillé et sélectionné un modèle auprès d’un chausseur français qui a ensuite fabriqué les bottes des Tabac Force. Je les remercie d’ailleurs pour leur enthousiasme et de leur généreuse participation. 

« Quand je collabore avec des réalisateurs ou des réalisatrices, j’aime qu’ils me donnent une gamme de couleur pour travailler »

De quelle façon avez-vous défini le code couleur des costumes (bleu, blanc et orange) ? 
J’ai demandé à Quentin et Joan qu’ils me donnent une gamme de couleurs avec lesquelles ils souhaitaient travailler. Nous avons fait nos recherches en fonction de leurs indications. Je me souviens qu’au départ, les oranges était plus vifs. Petite précision sur le blanc, il s’agit en réalité de la couleur crème. 
Nous nous sommes mis rapidement d’accord sur ces trois couleurs. De là, nous avons fait teindre les cuirs dans la quantité nécessaire et lancé la fabrication. Mais c’est un travail de collaboration. Quand je collabore avec des réalisateurs ou des réalisatrices, j’aime qu’ils me donnent une gamme de couleur pour travailler. Ce sont les couleurs du film qui vont définir sa direction artistique : la déco, la lumière, les costumes, etc. Bien-sûr, c’est une direction artistique dans laquelle je peux avoir mon mot à dire, y ajouter des suggestions… 

Quels sont les étapes de travail, après avoir trouvé le bon design des costumes ?  
Nous recherchons les matières, nous réalisons la prise des mesures des comédiens puis, nous lançons la fabrication d’un prototype, pas forcément dans la matière originale, pour avoir les bonnes coupes. Ensuite, la fabrication des originaux avec plusieurs essayages. Ici, trois essayages par comédiens ont été nécessaire.  
L’équipe costume, sur ce film, se composait de la manière suivante : 
– Mon assistante, une stagiaire et moi-même et moi pour la préparation en amont du tournage. Puis, deux habilleuses nous ont rejoint à la fin de la préparation.
– Sur le tournage, deux habilleuses, Stéphane de l’atelier de couture et moi pour les premiers jours des Tabac Force
– Les habilleuses étaient là pendant tout le tournage pour habiller et déshabiller les comédiens, réajuster leurs costumes au besoin, les nettoyer (il y a une scène avec du sang, d’autres où ils sortent de l’eau, etc….). C’était aussi du travail et une astreinte pour les comédiens de porter ces costumes de super héros.  

Nous avons fabriqué plusieurs exemplaires de costumes par comédiens et un jeu pour les cascadeurs car ils n’ont pas exactement les mêmes mensurations que les comédiens.

« Anaïs Demoustier avait l’impression d’étouffer »

Parlez-nous de la création des casques… 

J’ai dessiné les casques. J’ai appel à une petite boîte pour la conception. Ils ont dessiné le casque en 3D et ont réalisé un prototype. Mais c’est une autre société qui a fabriqué les casques car celle-ci n’avait pas la capacité de fabrication dans la quantité et dans les délais. Il nous fallait au minimum deux exemplaires de casque par comédien.

Aux essayages, nous ajustions ce qui n’allait pas. Plusieurs problèmes se sont posés, notamment pour que les acteurs puissent respirer. Anaïs Demoustier avait l’impression d’étouffer. Nous avons donc réfléchi à une technique afin que les acteurs puissent respirer et bien sûr avant la fabrication du premier prototype, au type d’ouverture, car les supers héros devaient les enlever et les mettre en direct à l’image pendant le tournage. Il y a eu deux prototypes de casque avant de trouver le bon.  
Il y avait plusieurs intervenants dans la réalisation des casques dont une costumière qui travaille le plastazote et qui a fait l’intérieur des casques.  

Les casques sont faits avec une résine, construites par des machines qui fabriquent en 3D.

Image : Les casques de la Tabac Force.
Crédit photo : Marine Arnoul – Instagram

Le costume Benoît Poelvoorde

« C’est lors d’une discussion avec Quentin, que j’ai pensé à Fantomas. Et ce fut notre inspiration pour le costume de Benoît Poelvoorde. Nous l’avons simplifié car il n’a pas de cape mais c’est sur cette base que nous avons travaillé son look […] Les vêtements qu’il porte ont été chiner ici et là ».

Synopsis
Après un combat acharné contre une tortue démoniaque, cinq justiciers qu’on appelle les « TABAC FORCE », reçoivent l’ordre de partir en retraite pour renforcer la cohésion de leur groupe qui est en train de se dégrader. Le séjour se déroule à merveille jusqu’à ce que Lézardin, empereur du Mal, décide d’anéantir la planète Terre…  

Au casting, Gilles Lellouche, Anaïs Demoustier, Jean-Philippe Zadi, Oulaya Ammra, Vincent Lacoste, Adèle Exarchopoulos, Doria Tellier, Jérôme Niel, Grégoire Ludig, Blanche Gardin… 

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