[CRITIQUE] – LE PROCESSUS DE PAIX : CAMILLE CHAMOUX ET DAMIEN BONNARD, LES MOÏSE DE L’AMOUR

Ils s’aiment mais ne se supportent plus. Pour éviter un divorce, ils établissent une liste de règles à respecter : la Charte Universelle des droits du couple. Marie et Simon parviendront-ils à sauver leur couple ? Le réalisateur Ilan Klipper revient avec un film dans l’air du temps, entre comédie de mœurs et comédie sociétale où, par ailleurs, toute la beauté du féminisme se dévoile dans des séquences d’anthologie.

Cessez-le feu !

La vie de couple n’est jamais chose aisée. D’autant plus lorsqu’on a des enfants. C’est une course permanente contre la montre. Du lever jusqu’au coucher, chaque couple vit une aventure effrénée où chaque situation peut amener à un conflit. Brossage des dents, préparation pour aller à l’école, retour à la maison après une journée de travail éreintante, bain des enfants, tout est soigneusement chronométré et, il suffit d’une petite chose, d’une personne moins investi, pour enclencher un cauchemar infernal et une série de querelles douloureuses. Marie et Simon en font les frais. Reproches, disputes, le couple est sur le point d’ imploser. Ils créent alors une charte du couple, 10 règles à respecter pour éviter une nouvelle guerre. Mais difficile de s’y tenir, d’admettre ses torts, de prendre en pleine figures des vérités que l’on ne veut pas forcément entendre.
Le réalisateur met tout ceci en scène, au travers des séquences familiales à la fois d’une authenticité sublime mais aussi d’une drôlerie rare, enroulées de dialogues savoureux et percutants. L’écriture scénaristique et les dialogues sont véritablement la force du film. Les répliques fusent, dans un flux ininterrompu, sans filtre, et tout le monde en prend pour son grade. N’en déplaise à un certain écrivain français ou à cet ancien chroniqueur télé, tous deux cinquantenaires et hétérosexuels comme ils aiment à le rappeler, pour qui les hommes « s’affaiblissent ». Camille Chamoux (Marie) et Damien Bonnard (Simon) font, en outre, une démonstration imparable de leur délire puritano-archaïque dans une séquence extraordinaire face à une fausse caricature de ces deux hommes, campée par Jean-Paul Bezzina.

Dans ce film, les hommes et les femmes s’assument. Ils et elles assument leurs propos, leurs envies, leurs désirs (cf. Jeanne Balibar), leurs coups de gueule, leur tristesse et leur désarroi. Aucun compromis dans cette comédie romantique, qui interpelle, questionne notre vision du couple et du féminisme, sans pour autant dicter une ligne de conduite à adopter ou légitimer un côté moralisateur souvent repoussant. Le Processus de Paix transmet son message tout en finesse, de façon intelligente, dans une image colorée et séduisante. Mais rien ne serait possible sans les deux protagonistes principaux du film.

C’est parce que Marie et Simon sont attachants, pétillants d’humanité et profondément humains (aimants, maladroits, avec leurs failles et leurs qualités) que la comédie fonctionne, que nous comprenons les points de vue exposés et que l’identification est possible.

Il y a une autre habileté scénaristique dans le long-métrage de Ilan Klipper. Ce que vivent au quotidien Marie et Simon a un impact positif ou négatif sur leur vie professionnelle. Lorsque tout va bien, Simon, professeur d’histoire, parle avec engouement de réconciliation, de réunification, de paix (sur un sujet historique) face à des élèves enthousiastes. Au contraire, lorsque tout va mal, Marie, chroniqueuse radio à la tête de son émission « Point G », parle d’une manière un peu trop déprimante à ses auditrices. Cela donne lieu, par ailleurs, à des scènes particulièrement touchantes. Car derrière la façade de la comédie, Le Processus de Paix est également un drame avec des enjeux émotionnels forts. Et l’émotion est bien là ! Dans l’œil de Camille Chamoux et sur le visage de Damien Bonnard, une incontestable détresse et une soif attendrissante de sauver leur couple. Le cinéaste confronte à cette angoisse de la perte. Dès lors, il rappelle que le bonheur est fragile. Un bonheur toutefois accessible à tous et qui se terre dans une multitude de décisions, de choix que nous prenons et qui ne sont pas forcément ceux auxquels nous pourrions nous attendre. Il suffit alors de s’ouvrir et de casser certains codes de la société pour trouver ce bonheur tant convoité. Car il n’y a pas qu’une vision du couple, mais des possibilités infinies…

Conclusion

Le Processus de Paix est une comédie romantique rafraîchissante, unique en son genre. Camille Chamoux et Damien Bonnard forment un duo d’une grande tendresse, mis en scène par un Ilan Klipper brillant, qui oscille entre comédie de mœurs impitoyable et comédie sociétale ingénieuse. Dans ce ménage sentimental, le récit se compose aussi autour de personnages secondaires sensationnels qui viennent accentuer la comédie du film et l’attachement à ce couple pour qui le bonheur est une lutte constante.

Le Processus de Paix le 14 juin au cinéma.



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