[INTERVIEW] – PLUS BELLE LA VIE, ENCORE PLUS BELLE : AGATHE DE LA BOULAYE (VANESSA KEPLER) EST LA NOUVELLE CHARLES FRÉMONT DU MISTRAL : « Notre travail, ce n’est pas de juger les personnages que l’on joue »

Dans « Plus Belle la Vie, encore Plus Belle » Agathe de la Boulaye incarne Vanessa Kepler, une femme d’affaires diabolique, mystérieuse et complexe. Un personnage surprenant, savoureux, probablement élaboré par les auteurs/autrices de la série dans l’espoir d’être « l’enfant » de Charles Frémont (Alexandre Fabre) et Anémone Vitreuil (Anne Canovas), deux antagonistes qui ont fait le succès d’antan de « Plus Belle la Vie ». Et Vanessa Kepler remplit prodigieusement cette fonction d’anti-héroïne, où derrière un caractère fort et sans pitié, se terre pourtant une humanité que la solitude ainsi qu’un passé douloureux ne laissent éclore.

Son interprète, Agathe de la Boulaye, offre à cette figure diablesque une fragilité, une dureté, des couleurs vers l’émotion, d’une vérité puissante et d’une justesse phénoménale. Et il fallait une comédienne de talent pour revêtir le costume d’un personnage romanesque si obscur, si ambiguë, si poignant, afin de transcrire à l’écran toutes ces palettes d’émotions subtiles.

Alors qu’il y a quelques jours, nous fêtions la diffusion du 100ème épisode, Agathe de la Boulaye se confie sur son arrivée à « Plus Belle la Vie, encore Plus Belle », la création de son personnage, et revient sur sa dernière intrigue au côté de Cécilia Hornus.

« J’aime l’évolution de Vanessa Kepler »

Racontez-nous votre arrivée sur « Plus belle la vie, encore plus belle »…
J’ai passé une audition, de la manière la plus simple qui soit. J’ai joué la scène où je présentais l’histoire du collier à Léa Nebout et lui expliquait qu’il serait mis aux enchères dans l’objectif de récolter des fonds pour dédommager les habitants du Mistral ayant subi les effondrements.
J’ai ensuite découvert, au fur et à mesure, l’étendu de ce que le personnage vivait, ses strates géologiques ainsi que toutes ses facettes cachées. Ce qui était particulièrement plaisant, pendant le travail de l’audition, c’était de voir que Vanessa Kepler avait en effet plusieurs couches, et des reliefs très contrastés. J’adore construire des personnages et là, j’ai été servie.

Vous connaissiez la série avant de la caster ?
Oui, je connaissais la série. Je me suis même replongée dedans pour préparer l’audition. J’avais un lien avec « Plus Belle la Vie » grâce à un petit cousin qui était complètement accro. Il chantait le générique. Lors d’un été en Bretagne, je me souviens qu’il nous avait tous rendus accros à la série.

Votre personnage est un subtil mélange entre Charles Frémont et Anémone Vitreuil, est-ce ainsi que l’on vous a présenté le personnage de Vanessa Kepler ?

(rire). On ne m’a pas fait de références, on m’a cependant dit cette phrase : « Tu vas être celle qu’on adore détester ». Ça m’a fait plaisir car je n’ai jamais eu l’opportunité de construire un personnage comme celui-là. […] Dans le rapport adorer/détester, lorsqu’une personne vit des choses profondes et s’humanise, on s’en rapproche forcément. Néanmoins, moi-même, en tant que spectatrice, je me demande souvent : est-ce que j’aime aimer une personne que j’ai détesté ? Je ne suis pas sûre. C’est un élastique tendu entre l’envie de l’aimer et aimer la détester. Mais il y a un attachement certain avec le spectateur, quel qu’il soit. Le but de ce programme est aussi de rentrer dans les personnages et de savoir pourquoi ils sont devenus tels qu’ils sont.

Nous, notre travail, ce n’est pas de juger les personnages que l’on joue. Et c’est un travail intéressant et jouissif. J’aime son évolution. C’est un personnage qui est beau parce qu’il est complexe. Elle a des paradoxes, des facettes qu’elle montre en société, d’autres dans l’intimité. Elle a des secrets. À jouer, je me régale.

« Ce personnage, il se balade tout le temps avec moi »

Comment vous êtes-vous glissée dans la peau de Vanessa Kepler ?
Je me prépare avec les infos que l’on me donne et, ensuite, je pars en « cuisine ». J’ai aussi eu une grande conversation avec la production afin de savoir quelle vision il avait du personnage. Un autre facteur déterminant pour moi, a été les costumes. Les costumes, la coiffure, ça crée un personnage. Ainsi que le décor. Où vit cette personne ? Tous ces éléments vont nourrir la vision que je me fais. Évidemment, je ne voulais pas en faire quelqu’un de purement méchant. Je me suis intéressée à pourquoi cette personne est impénétrable et pourquoi elle crée tant de distance avec les autres ? C’est un personnage, par exemple, que nous n’avons jamais vu avec des amis. Comment vit-on sans ça ? Pourquoi vit-on sans affect, sauf avec ses enfants ? Y’a-t-il un danger ? Et de commencer sa journée ainsi, qu’est-ce qu’on ressent ? Quel monde a-t-elle bâti à l’intérieur d’elle-même, quelle protection, pour que ça se passe de cette façon aujourd’hui ? C’est de la survie. De quelle manière a-t-elle créait cette distance ? Qu’est-ce que ça crée en elle ? Une grande solitude. Ce fut mon angle d’approche. J’ai choisi avec ça, les mots qui définiraient Vanessa Kepler. J’essaie des mots comme si je les goûtais à l’intérieur et je vois si ça colle à la vision de la production et si elle converge avec la mienne. J’avance ainsi.

Ce qui est intéressant en tant que comédienne sur « Plus Belle la Vie » , c’est que tous les 15 jours, il y a de nouveaux réalisateurs et auteurs et, eux mêmes, ont une vision du personnage. Bien qu’ils gardent une cohérence. On avance comme ça, de semaine en semaine. Chacun va faire évoluer le personnage. Je suis friande de cette manière de fonctionner. J’aime le dialogue.

On peut facilement tomber dans la caricature lorsqu’on incarne un « méchant ». De quelle façon avez-vous évité le piège ?
J’ai eu de la chance car les auteurs ont parfaitement dessiné ce personnage. Bien-sûr, ne pas être un cliché est une contrainte, un piège dans lequel il ne faut pas tomber. Puis, de l’humaniser. C’est ce procédé qui permet de ne pas aller vers la caricature. Je me pose plein de questions et j’essaie d’y répondre avec mon imagination. Ce personnage, il s’assoit à côté de moi, il se balade tout le temps avec moi, j’observe les gens autour de moi et j’ai un nouveau prisme de questionnements quand je suis avec elle. Je m’inspire également de séries que j’ai vues et des comédiennes qui ont réussi à humaniser leur personnage. C’est un mélange. Un travail passionnant !

Dans la dernière intrigue, vous vous confrontez à Luna et Blanche pour obtenir le bâtiment où elles souhaitent installer leur association. Une intrigue où on en apprend davantage sur votre personnage, sur son passé et ses failles…
Du caviar ! Lorsque j’ai reçu les textes, j’ai appelé la coordinatrice d’écriture pour lui faire part de mon enthousiasme. Nous sommes dans du Victor Hugo ! C’était intense mais, en tant que comédienne, ce sont les reliefs et ça m’a donné l’opportunité de jouer avec Cécilia Hornus. C’était que du bonheur ! Nos scènes étaient vraiment bien écrites et nous avons pris beaucoup de plaisir à confronter nos personnages et à jouer ces séquences-là.

« C’est ce que j’adore dans nos métiers, chaque personne conçoit quelque chose d’indispensable qui vient nourrir toute la vision générale »

On vous voit pleurer, vous mettre en colère, douter, être dure et en proie à un passé qu’elle veut oublier. Que va-t-on puiser au fond de soi pour retranscrire de telles émotions à l’écran avec vérité et sincérité ?

Vous savez, quand les dialogues sont bien écrits, c’est déjà une bonne partie du travail qui est fait. Ensuite, en situation, nous sommes comme des funambules. Nous ne savons pas à l’avance si cela va fonctionner mais lorsqu’on est ensemble, qu’on est avec, qu’on prend appui sur l’autre, tout devient plus facile. Après, c’est une robinetterie étrange, où les émotions arrivent par des chemins différents. Il y a aussi la direction d’acteurs à laquelle je suis très sensible. J’adore le rapport avec les réalisateurs et les coachs sur place. Une toute petite indication peut tout changer. Dès lors, je surfe sur ça. C’est confus mais c’est un mécanisme étrange et difficile à expliquer. Parfois, des comédiens pensent à des histoires vécues intimes, ce qui n’est pas mon cas.

Chacun a sa technique. Pour ma part, jouer avec, c’est être avec, c’est la chose la plus importante.
[…] Il arrive que de temps en temps, ça ne prenne pas, que l’émotion ne vienne pas. Nous ne sommes pas des machines. Toutefois, c’est génial que ce soit fragile.

Il y a une séquence où vous êtes prisonnière du bâtiment avec Blanche Marci. Parlez-nous des coulisses de cette scène, au côté de Cécilia Hornus, et de votre travail ensemble…

Comme je le disais, ce fut un grand plaisir de tourner avec Cécilia car c’est à la fois une grande comédienne et un être humain délicieux. Ces séquences sont merveilleusement écrites et nous avions hâte de les jouer d’autant que les décorateurs ont fait un travail impressionnant pour créer ce décor en studio. Ça aussi, ça vous inspire. C’est ce que j’adore dans nos métiers, chaque personne conçoit quelque chose d’indispensable qui vient nourrir toute la vision générale. On fabrique ensemble. Je m’ennuie en créant toute seule. Ce huis-clos à deux, dans cette situation, c’était intense. Nous étions concentrées, il y avait une concentration de la part de toute l’équipe afin de donner le maximum.

Il y a une scène où je dois mettre le feu au carnet, et lorsque vous avez des séquences techniques ça prend davantage de temps parce qu’il y a un risque que ça ne fonctionne pas. Et d’ailleurs, ça n’a pas fonctionné. Au moment où je devais jeter le cahier plus loin, ça faisait un appel d’air et le feu ne prenait pas. C’est drôle et ce sont dans ces instants là où je me dis que je fais un métier génial. On joue à faire semblant. Ce fut donc beaucoup de concentration et de joie.

A-t-il été évident pour vous de vous intégrer à la famille « Plus Belle la Vie » puisque beaucoup de l’équipe technique et des acteurs se connaissaient déjà ?
Pour les nouveaux arrivants, Cécilia Hornus et Laurent Kérusoré ont été dans l’accueil. Je leur tire ma révérence. Ils sont le garant de l’esprit « Plus Belle la Vie ». C’est une vraie troupe et il n’y a jamais eu aucun sens de propriété de ces deux anciens, qui pourraient l’avoir. Ça contribue à créer cet esprit « Plus Belle ». Quand je suis arrivée, j’y ai trouvé des gens d’une extrême gentillesse. Tous, sans exception. C’est vraiment agréable. Lorsque je reviens sur Marseille pour tourner, je retrouve cette ambiance de troupe de théâtre que j’apprécie.

« Plus Belle la Vie, encore plus belle » est diffusé du lundi au vendredi sur TF1 dès 13h50.

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