Depuis ses débuts prometteurs en 2016 dans le long-métrage d’Eva Husson « Bang Gang (une histoire d’amour moderne)», Marilyn Lima ne cesse d’impressionner. Sirène, enquêtrice ou surfeuse, chaque rôle confirme un talent immense, un amour absolu pour le jeu où s’ajoute des choix de carrière audacieux jamais prévisibles. Marilyn Lima va là où on ne l’attend pas, ose, propose, s’affirme et prend sa place au sein de la fiction française avec générosité, innocence et passion. Oui, elle est un des joyaux du paysage audiovisuel français !
Pour la diffusion prochaine du film « Maraé », la jeune comédienne se confie sur entrée dans le cinéma et sur ses derniers projets entre rencontres et coulisses de tournage.
« J’ai besoin de vivre des émotions dans la vraie vie […] pour les retranscrire dans mes personnages »
Le métier d’actrice vous est tombé dessus par hasard. Et grâce à une réalisatrice, Eva Husson…
Je sortais du lycée et je ne savais pas trop quoi faire. Je pense que je serais partie vers des études d’art en suivant le dessin car ça m’a toujours beaucoup plu. J’avais une bande de copains photographes avec qui je passais du temps et, un jour, un d’entre eux, Finnegan Oldfield, a réalisé une exposition photographique à Paris. Dans cette exposition, il y avait des photos de moi. La réalisatrice Eva Husson, qui cherchait le premier rôle de son prochain film « Bang Gang (une histoire d’amour moderne)», est allée à cette exposition et, elle est tombée sur une photo de moi. Elle a donc cherché à me contacter par téléphone. Nous nous sommes rencontrées et j’ai passé les essais. L’aventure du cinéma a commencé ainsi. Ma bonne étoile a mis cette opportunité sur mon chemin. Aujourd’hui, je suis heureuse d’être comédienne. J’ai beaucoup de gratitude sur le choix qu’Eva a fait.
Avez-vous hésité à dire oui ?
À l’époque, j’ai fonctionné à l’instinct. Je me suis vraiment dit que ça serait une très belle expérience. Je crois aussi que je ne me rendais pas compte de ce que c’était que d’avoir un premier rôle au cinéma. Et l’aventure a été merveilleuse. J’ai accepté sans me poser trop de questions et c’est encore le cas. J’agis toujours ainsi, avec le cœur et l’instinct. Je n’avais donc pas d’appréhensions, je vis le moment présent.
Le jeu, la comédie, ce fut difficile à appréhender au départ ?
Même à mes débuts, jen’abordais pas mon métier avec ces questionnements « est-ce que ça va être compliqué ? ». Jouer a toujours été un bonheur, et tous les tournages sur lesquels j’ai la chance d’être depuis des années maintenant, je les savoure. D’ailleurs, je m’étonne, continuellement, de tournage en tournage, de parvenir à trouver des choses au fond de moi, d’être capable d’aller chercher des sensations, des émotions. Chaque tournage est un apprentissage sur moi, sur ma vie, sur les autres, sur ce métier. Je ne le vois pas comme un exercice difficile. Les films ou les scènes intenses à jouer sont des expériences. Puis, comme on le dit souvent, c’est sur le terrain qu’on apprend le mieux.
C’est ma recette. Et vivre des émotions dans la vie de tous les jours, j’ai besoin de ça. J’ai besoin de vivre des vraies choses pour les retranscrire dans mes personnages.
Après ce film, est-ce là que vous avez eu envie de devenir comédienne ?
Ça a été une discussion avec mon premier agent parce que je pensais que c’était le coup d’une chance, d’une seule fois. Et je me demandais si je serais capable d’incarner d’autres personnages, dans des registres différents. Elle m’a proposé de passer des castings, mais je n’étais engagée à rien puisqu’on peut arrêter le métier à tout moment. Mais je voulais voir où ce chemin mènerait. Et je ne regrette pas une seule seconde.
Par la suite, tout s’est enchaîné assez vite. Il y a eu notamment « Skam », où vous interprétiez le rôle de Manon. C’est là que le grand public vous a découverte. Que retiendrez-vous de cette expérience télévisuelle ?
« Skam» a été une expérience forte en émotions, autant personnelle que professionnelle. C’est une série intense à tourner, puisque l’économie de tournage impose de réaliser plusieurs minutes utiles par jour. Il nous est arrivé, une fois, de tourner 17 minutes utiles en une seule journée. Il faut alors savoir être bon sur une seule prise, être capable de changer son micro pendant qu’on se change tout en buvant son café et en répétant une scène (rire). C’est formateur. Nous n’avons pas le droit à l’erreur. Nous devons être bons et efficaces, intensément, d’autant que le niveau d’exigence est élevé. Puis, il y avait le contact des fans. La série nous a permis, à tous, d’avoir une notoriété. C’est fou d’avoir vécu ça, c’est magique, car leur contact exprimait envers nous un grand attachement. Il y avait des jeunes filles qui tombaient en larmes dans nos bras.
« L’histoire d’une Sirène à Paris était si belle que nous avions, Nicolas et moi, tant envie de la défendre, que nous y avons mis tout notre cœur »
En 2020, vous avez joué dans « Une Sirène à Paris». Vous incarnez Lula, la sirène. De quelle manière avez-vous abordé ce rôle et l’univers singulier de Mathias Malzieu ?
Mathias, c’est un être de lumière sur cette planète. Ce sont d’abord des rencontres avec lui afin de rentrer dans son univers, mais aussi littéraire que cinématographique (« Jack, la mécanique du cœur»). J’ai abordé le personnage par le biais du chant car nous avons d’abord enregistré la bande-originale du film avec Nicolas Duvauchelle. Ce fut une bonne entrée en matière pour se glisser dans la peau de nos personnages respectifs. J’ai peut-être même, en premier lieu, abordé le personnage de Lula comme une chanteuse plus que comme une sirène. Étant donné qu’elle a un pouvoir sur les hommes également grâce à sa voix, le chant m’a permis, en parallèle, de travailler cet aspect-là de Lula.
Ensuite, lorsqu’on porte une queue de sirène de 12kg, on est vite dans la peau du personnage (rire). C’était physique parce que j’étais limitée dans mes mouvements, je dépendais de personnes tierses pour me porter sur le plateau afin de m’emmener sur le décor. La queue a été moulée dans un plâtre sur le modèle de mes jambes. Vous ajoutez ensuite du néoprène comme sur les combinaisons de surf. J’avais 3 modèles différents, dont un, un peu plus lourd que les autres, car il y avait de la lumière à l’intérieur. J’en ai gardé une en souvenir. Je portais une perruque, avec tout ça, j’oubliais complètement Marilyn.
Lorsque vous êtes dans un décor si féerique, vous êtes comme un enfant. C’est ce que nous étions sur le plateau. Mathias a toujours des idées plus merveilleuses les unes que les autres. Il mélange la réalité, son univers d’enfant, ses rêves et ses vraies histoires. C’est ça qui est beau. Son côté enfantin, c’est son quotidien. Les 3/4 des accessoires sont des petits bibelots qui lui appartiennent personnellement. Nous nous imprégnons de son univers pour composer nos personnages.
Un rôle de sirène, c’est difficilement refusable…
Oui. J’ai pris une journée de recul par rapport à la proposition parce que j’avais envie d’être à la hauteur et de faire quelque chose de beau et de grand. Je n’allais pas refuser mais j’avais besoin de réaliser l’ampleur du personnage que j’allais incarner et la grandeur de cette histoire.
Comment avez-vous créé la relation avec Nicolas Duvauchelle ?
Nous tournions en Macédoine. De fait, lorsque vous êtes hébergés dans le même hôtel avec toute une équipe, la complicité se crée très vite. Lui aussi, il endossait un personnage qu’il n’avait pas l’habitude de jouer. Il était d’ailleurs ravie d’avoir cette opportunité, il disait que c’était un film que ses filles allaient enfin pouvoir regarder. Donc, ce fut naturel. L’histoire était si belle, je me répète, et nous avions tant envie de la défendre, que nous y avons mis tout notre cœur. C’est cette envie qui nous a donné la force de créer cette relation.
Récemment, nous avons pu vous voir dans « Brigade Anonyme » de Julien Seri avec Eric Cantona et Arié Elmaleh. Ce fut de belles rencontres ?
Oui, je suis impatiente de les retrouver pour la saison 2. Eric et Arié sont fantastiques et ce sont deux personnages hauts-en-couleur avec des personnalités différentes. Eric est un amour et Arié me fait mourir de rire. Julien, je l’adore. […] Je sais que Julien vient surtout de l’action mais je n’ai pas eu d’appréhensions vis-à-vis de ça. J’ai juste envie de bien faire et ne décevoir personne, d’être au niveau de ce que l’on me propose. Je le prends comme un challenge avec moi, un dépassement de soi. Toujours avec une bonne énergie, ça ne part jamais d’une peur ou d’une crainte. Lorsque ce sont des métiers de passion, nous avons envie que ça fonctionne. J’ai été ravi de faire partie de cette aventure, notamment avec Julien parce que c’est un réalisateur dynamique, profondément passionné et humain. Pas une seule fois nous avons terminé en retard sur le tournage. Il est ultra-efficace. Nous finissions même parfois une heure en avance. Mais ça va vite parce qu’il sait ce qu’il veut, il est précis. Pour rebondir à ce que je disais sur « Skam», cette expérience a été très utile sur « Brigade Anonyme» pour être efficace comme il le demandait.
Se sent-on un devoir de responsabilité, lorsqu’on tourne dans une fiction inspirée d’une histoire vraie ?
Je me détache de ça. Je laisse les auteurs gérer ça, peut-être qu’eux ont davantage de pression. Même si c’est plus épuré et moins dur que ce que peut être la réalité, c’est un sujet important que l’on transmet au grand public. Mais c’est pour ça que nous faisons ce métier, des films et de la fiction, afin de transmettre des messages.
« Quand on est comédien et que vous avez l’aubaine de jouer des rôles comme celui-ci (« Bugarach ») avec tellement d’enjeux, c’est du bonheur ! »
Dans « Bugarach » . Certaines scènes au sommet ont été réalisées derrière un écran LED en studio. C’est une technologie avec laquelle vous avez aimé tourner ?
C’était particulier de tourner en studio, j’étais impatiente et curieuse de découvrir ce nouvel environnement. Je reste cependant mitigée face à cet essai. C’est compliqué pour un comédien qui a l’habitude de tourner dans des décors réels de s’habituer à un fond vert ou fond LED. Toutefois, le résultat que ça engendre est dingue ! Je serai heureuse de rejouer dans ces conditions pour pousser ma capacité d’adaptation derrière un fond vert ou un fond LED. Ça fait appel à l’imaginaire du comédien. C’était une expérience particulière néanmoins, pour moi qui rêve de faire un film Marvel sur des fonds verts, ça m’a donné la possibilité de sortir de ma zone de confort. C’est pour cela que je souhaite réitérer l’expérience, afin que ça devienne une zone de confort.
Ce qui était amusant, ce fut les sauts en extérieur derrière un fond vert où nous simulions les sauts dans le vortex. J’ai dû sauter 40 à 50 fois dans la journée, accrochée à une grue. J’adore ce genre de tournage. Si je pouvais en faire de plus en plus, sortir des flingues, me rouler par terre, j’achète direct. Je prendrais tout ce qu’il y a à prendre, j’aime ce métier. J’ai beaucoup de reconnaissance tous les matins, à me lever pour réaliser ce genre de choses.
Vous vous rêvez en Captain Marvel ?
Franchement, oui (rire). Le métier de comédien est merveilleux. Nous pouvons avoir mille vies en une. De « Captain Marvel » au « Les Chroniques de Bridgerton », tout me botterait.
« Tourner Bugarach était une friandise »
Dans la série, votre personnage voyage de mondes parallèles en monde parallèles, c’était amusant, en tant que comédienne, de pouvoir incarner le même personnage mais dans des postures et des costumes chaque fois différents ?
Carrément ! Je connaissais le scénario sur le bout des doigts et peut-être mieux que la scripte elle-même (rire). Lorsque j’arrivais en loge pour les raccords, je savais pertinemment où quoi comment nous étions. Nous ne tournions pas dans l’ordre chronologique donc, connaître l’ordre des différents mondes était essentiel car il y en avait une dizaine, d’autant que nous avons tourné espacement sur une période de huit mois.
Quand on est comédien et que vous avez l’aubaine de jouer des rôles comme celui-ci avec tellement d’enjeux, c’est du bonheur ! J’étais ravie. Tourner cette série était une friandise.
Dans « Marae », vous incarnez une jeune surfeuse qui débarque en compagnie de 3 amies sur une île polynésienne. Le tournage a eu lieu à Tahiti. Comment s’est déroulé le tournage sur place ?
Le tournage s’est déroulé dans une atmosphère respectueuse envers la culture polynésienne. Nous avons tous fait la démarche dans une grande bienveillance afin de respecter les coutumes et les traditions. Nous nous sommes rapprochés d’une partie de l’équipe technique qui était des locaux et nous avons été sur des « maraé » en amont pour apprendre les coutumes, savoir ce qui fallait faire et ne pas faire avant de tourner. Il faut aussi savoir se faire tout petit avec les éléments là-bas. D’ailleurs, qu’on y croit ou pas, lorsqu’on débarque à Tahiti, on finit par rentrer dans cette culture. Ce fut de merveilleuses rencontres. Nous avons été infusés à Tahiti. Il s’est passé quelque chose de fort là-bas, de très fort en connexion entre nous et les rencontres que nous avons pu faire. Ça a dépassé le simple tournage.
Dans cette aventure, vous êtes accompagnée de Adèle Galloy, Marie Zabukovec et Vaimiti Teiefitu. Ça été facile de vous apprivoiser pour créer cette amitié et cette complicité qu’on retrouve à l’écran ?
Ça a été très audacieux de la part de la production de nous mettre dans la même maison. Vaimiti habite à Tahiti. Mais Adèle, Marie et moi nous avons habité ensemble, sans se connaître. En vérité, dans ce genre de situation, ça passe ou ça casse. Pour nous, ce fut une révélation. Nous nous sommes entendues à merveille alors que nous sommes très différentes. Cependant, nous avons une empathie et une bienveillance qui a fonctionné, a fusionné. Nous avons tellement rigolé. Ça a été un cadeau d’être avec elles durant six semaines. C’est rare d’avoir une telle alchimie. Nous sommes ravies que ça se voit à l’écran. De fait, nous n’avons pas eu beaucoup à jouer. C’était simple et fluide.
Il y a une séquence dans le film où vous êtes capturée par les « démons » et attachée à des poteaux. On ne va pas spoiler ce qu’il s’y passe mais je voulais avoir votre ressenti sur cette scène. Est-ce que ce sont des séquences intenses et difficiles à tourner ?
Nous avons tourné cette séquence sur deux nuits. Les tournages de nuit ne sont pas les plus évidents car le corps fatigue, il est fait pour se reposer à ces heures-ci. C’était intense de tenir cette gravité sur les deux nuits mais c’est notre métier. Personnellement, j’adore devoir me surpasser et jouer des scènes aussi bien qu’elles sont écrites.[…] Sur cette séquence, nous étions également spectateurs de ce qui se passait devant nous. Nous avons eu le droit à un spectacle assez fou. J’en ai eu la chair de poule. Nous avons beau être accrochés à un poteau, nous avions un show captivant et, honnêtement, le temps passe plus vite ainsi. Car, attachée toute la nuit, ça peut être long (rire).
C’est Jacques Kluger qui réalise le film. Parlez-nous de votre collaboration sur le tournage…
J’ai eu le rôle en sortant du casting. Le directeur de casting m’a appelée alors que je sortais du métro pour me confirmer ma participation au film. J’avais envie de faire un film de genre donc, pour le casting, je me suis arrachée. Tous les comédiens autour de moi ont envie de ça, jouer dans un film de genre. Jacques était concentré à réussir le film de genre et cela nous a laissé beaucoup de libertés et de place à l’improvisation. J’aime quand un réalisateur m’en dit le moins possible pendant un tournage. Je préfère qu’on me parle avec des regards. Il a été un parfait chef d’orchestre. Puis, le chef opérateur Anthony Diaz, nous a fait une image sublime.